ACTA UNIVERSITATIS LODZIENSIS
Folia Litteraria Romanica 19(1), 2024
https://doi.org/10.18778/1505-9065.19.04

Étienne Bourdon* Orcid

Université Grenoble Alpes

Le « monstre de Cracovie » : savoirs, religion et politique dans la Cosmographie universelle (1575) de François de Belleforest

RÉSUMÉ

Un monstre humanoïde serait né à Cracovie en 1547. Il connaît une certaine célébrité et se retrouve dans des ouvrages naturalistes, de tératologie, de prodiges ou encore des cosmographies. Alors qu’il est souvent utilisé pour dénoncer les persécutions contre les protestants, le catholique intransigeant François de Belleforest l’insère dans sa Cosmographie universelle en 1575. Dans sa dénonciation du protestantisme, Belleforest est souvent radical, devient à l’occasion manichéen, voire violent, et utilise la nouvelle Imago Mundi au service de son combat. Son usage politique de la géographie est d’autant plus efficace que l’ouvrage touche un large public avide de découvrir une synthèse des récentes découvertes sur le monde. L’article procède à une archéologie de cette gravure, et étudie l’élaboration et la circulation des savoirs cosmographiques, ainsi que leurs usages confessionnels et politiques. Il apparaît que Belleforest dote cette gravure d’un sens nouveau qui met en évidence les angoisses eschatologiques et politiques en cette période charnière de passage du pouvoir de Charles IX à Henri III.

MOTS-CLÉS – Monstre de Cracovie, François de Belleforest, Cosmographie, Guerres de Religion, Tératologie, Henri III

The “Monster of Krakow”: Knowledge, Religion and Politics in the François de Belleforest’s Cosmographie Universelle (1575)

SUMMARY

According to the common belief, a humanoid monster was born in Krakow in 1547. This creature thenceforth gained a certain popularity and has since been widely represented in naturalistic works, in works of teratology, in books of prodigies, and even in cosmographies. While this frightful figure is often used to denounce the persecutions against Protestants, the intransigent Catholic François de Belleforest inserts it into his Cosmographie universelle published in 1575. In his denunciation of Protestantism, Belleforest is often radical, occasionally becomes Manichean or even violent, and uses the new Imago Mundi as a weapon that serves his fight. His political use of geography is all the more effective as this book reaches a large audience eager to delve into such syntheses of recent discoveries about the world. In this article, I carry out an archeology of the engraving entitled “The Krakow Monster”. I explore the development and circulation of cosmographic knowledge as well as its denominational and political uses. It appears that Belleforest endows this engraving with a new meaning which highlights the eschatological and political anxieties through this pivotal period of the handover of power from Charles IX to Henry III.

KEYWORDS — Monster of Krakow, François de Belleforest, Cosmography, French wars of religion, teratology, Henri III


Introduction

La Cosmographie universelle de François de Belleforest (1575) recèle une gravure qui a dû surprendre plus d’un lecteur (Fig. 1)[1]. Celle-ci représente un monstre humanoïde qui serait né à Cracovie, au milieu du XVIe siècle. Si elle n’a évidemment pas échappé aux seiziémistes[2], aucune explication politique satisfaisante n’en a été proposé. Or, pour comprendre cette gravure, il faut se rappeler à quel point François de Belleforest a activement participé par la plume aux guerres de Religion. Bien que sa volumineuse Cosmographie universelle reprenne en partie celle du protestant bâlois Sébastien Münster, c’est au service de la cause catholique que François de Belleforest écrit. Dans sa dénonciation du protestantisme, son discours est souvent radical, devient à l’occasion manichéen, voire violent, et utilise la nouvelle Imago Mundi au service de son combat. Son usage politique de la géographie est d’autant plus efficace que l’ouvrage touche un large public avide de découvrir une synthèse des récentes découvertes sur le monde. Par le statut de vérité qu’il donne à son discours, l’encyclopédiste replace les guerres de Religion dans le combat pluriséculaire qui oppose le vrai au faux, le bien au mal, le juste à l’inique dans le but de travailler à l’avènement du Royaume de Dieu. Sa Cosmographie universelle (1575) devient alors une arme à la fois théologique, confessionnelle et politique. Le but de cet article est de tenter d’élucider le sens politique du « Monstre de Cracovie » et de mettre en évidence que cette naissance prodigieuse est porteuse d’un discours sur l’altérité anthropologique des confins de la chrétienté, mais aussi sur les terribles luttes confessionnelles qui déchirent alors le royaume de France, au moment où le trône passe de Charles IX à Henri III et dans la crainte d’une faiblesse du pouvoir à l’égard des protestants. En procédant à une archéologie de cette gravure et de ses usages nous mettrons en évidence les jeux de savoirs et de spatialités dans la chrétienté et dans l’espace du livre, la façon dont le monstre interpelle les contemporains et les invite à déchiffrer le monde, et enfin la façon dont François de Belleforest en donne une interprétation à la fois catholique et politique.

Figure 1. Le monstre de Cracovie (F. de Belleforest, CU, I, 2, 1575, 1814-1815 ; BM Grenoble, Bd.512)

1. « Un monstre nay en Graccovie »

Ce monstre est en effet peu ordinaire. Ce n’est pas tant qu’il est une sorte d’hybride homme-animal, mais surtout que sur une physionomie générale humanoïde et râblée soient greffées des têtes de singe sur les muscles pectoraux, des têtes de chien aux coudes et aux genoux, des yeux globuleux ronds et noirs, prolongés horizontalement par des sortes de houppes oculaires qui en intensifient le regard et que doublent à l’arrière des oreilles pointues. Une petite trompe prolonge le front et le nez, et se recourbe sur le côté. Les pattes avant et arrière sont palmées et les doigts crochus. Il arbore des yeux sur l’estomac, qui font ressembler le nombril à un nez, et un long appendice caudal en forme de fouet se terminant de façon étrange par deux crochets qui ne ressemblent pas tant à une pince qu’à un croissant de lune qui se dresserait sur le haut de la gravure. La gravure est accompagnée d’une légende précisant que « C’est cy la figure d’un monstre, nay en Graccovie, au moys de Fevrier l’an de grace 1547. lequel ne vesquit, que 3. heures ». L’image comporte une deuxième légende – située à la suite de la gravure, en haut de la page suivante – qui affirme de façon plus obscure encore que « Paraventure ce labeur ne sera point inutile, d’avoir icy mis la figure de ce monstre, d’auta[n]t que par iceluy les hommes mortels peuvent estre admonestez de plusieurs choses »[3]. En revanche, à aucun moment François de Belleforest ne commente l’image et sa légende. La localisation de la gravure dans l’espace de la double page de l’ouvrage interroge aussi (Fig. 2). Ce monstre apparaît au moment où François de Belleforest vient de traiter des rois de Pologne, puis des villes épiscopales polonaises, et juste avant d’aborder la Lituanie.

La présence de cette gravure dans la Cosmographie universelle de François de Belleforest a de quoi surprendre. En effet, on sait bien que celui-ci s’est servi de la cosmographie de Sébastien Münster comme point de départ de son propre ouvrage. Pour certains chapitres, François de Belleforest se contente de reprendre le texte de l’humaniste bâlois, pour d’autres il apporte des précisions ou des corrections, ou bien réécrit intégralement le passage. Du point de vue des gravures, il en garde relativement peu non seulement parce que certains bois étaient devenus indisponibles, mais aussi parce que certaines ne convenaient plus à l’image qu’il voulait donner du monde. Ici, François de Belleforest ne change rien. Et concernant les monstres, il n’en garde que deux. Outre le monstre de Cracovie, il conserve la gravure des « monstres marins, et terrestres » que l’on rencontre dans les régions septentrionales de l’Europe (Fig. 3). On y voit des crevettes géantes et des homards démesurés qui s’emparent, grâce à leurs immenses pinces, de pauvres petits marins tombés à l’eau, des « veaux marins », des poissons gigantesques aux têtes de chouette ou de sanglier, d’immenses serpents de mer qui étreignent les caraques, ou encore des baleines menaçantes dont les jets d’eau qui surgissent de leurs évents s’élèvent si haut dans le ciel que leurs panaches dépassent les mâts les plus hauts des navires les plus grands.

Figure 2. Le monstre de Cracovie dans l’espace paginal (F. de Belleforest, CU, I, 2, 1575, 1813-1816 ; BM Grenoble, Bd.512)

François de Belleforest rappelle qu’on rencontre ces animaux dans les mers scandinaves, qu’ils auraient déjà été décrits par Solin et Boèce, et qu’ils ont encore été récemment observés par l’évêque d’Uppsala, Olaus Magnus, auquel il reprend cette gravure[4]. Ce sont bien des animaux étranges et extraordinaires – qui méritent qu’on en « fasse monstre » pour leur aspect incroyable[5] – mais qui n’appartiennent guère à la même catégorie que notre « monstre de Cracovie » qui s’apparente plutôt à ce qui est contre-nature. Du point de vue naturaliste et théologique de l’époque, les premiers témoignent de la toute-puissance de Dieu et de la diversité de ses créatures, et révèlent une certaine conception de l’altérité ontologique progressive des périphéries terrestres ; les seconds renvoient soit à l’étrangeté du monde animal – sans intentionnalité divine –, soit à la capacité de Dieu de déroger à Ses propres lois de la nature pour délivrer aux hommes un message. Ce croisement des lectures est renforcé par un véritable appétit de l’époque pour les ouvrages de tératologie dont témoigne Des monstres tant terrestres que marins du chirurgien Ambroise Paré, paru deux ans plus tôt (1573)[6].

Figure 3. Les monstres marins, et terrestres (F. de Belleforest, 1575, CU, I, 2, 1722-1723 ; BM Grenoble, Bd.512)

La présence du monstre de Cracovie dans la Cosmographie universelle de François de Belleforest est d’autant plus surprenante que l’auteur a pris la peine de chasser les nombreux monstres antiques que Sébastien Münster avait fait figurer. En effet, on ne trouve plus les célèbres cyclopes, blemmyes, sciapodes et cynocéphales (Fig. 4) qui étaient directement issus de l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien et qui avaient nourri les récits merveilleux de voyages médiévaux[7]. En effet, François de Belleforest écrit trois décennies après Sébastien Münster, à une époque où les progrès zoologiques et anatomiques, et la multiplicité des voyages ont fait renoncer à la croyance en la diversité des espèces humanoïdes au profit de la pluralité des peuples et des cultures[8]. François de Belleforest n’a aucun doute et préfère tenir

à part les folles narrations de ceux qui nous sont faint [sic, feint] des hommes d’autre effigie que celle que la nature a donnee comme a tout le genre humain, comme d’en avoir sans la[n]gue, d’autres qui sont sans teste, [...] d’autres qui ont les yeux a l’estomach, d’autres qui n’en ont qu’un au milieu du front, ainsi que les Poëtes faignent de leur Polypheme[9].

Il ne peut non plus accepter les blemmyes légendaires, africains ou asiatiques, que Sébastien Münster représentait avec un visage sur le ventre et une bouche sur l’estomac, ce que les nouveaux savoirs anatomiques rendent incompatibles avec ce que l’on sait alors du système digestif. Pour Belleforest, ceux qui croient en l’existence des blemmyes ne sont que des menteurs, car « ils disent n’avoir point de teste, & lesquels ont les yeux aux espaules, mais il ne dient point par où est-ce qu’ils mangent, car il faut qu’ils ayent la bouche en l’orifice de l’estomach, & que leur digestion se face au lieu mesme où s’assemble la matiere fecale »[10]. On remarquera au passage que le monstre de Cracovie a bien des yeux sur le ventre, mais non une bouche, ce qui écarte le problème anatomique relevé par François de Belleforest. Celui-ci se refuse désormais à croire à ces « monstra humana », ces divers peuples monstrueux que Dieu n’aurait jamais voulu créer. En revanche, ce qui apparaît contre-nature ne peut être, sous sa plume, que des écarts divins et volontaires au fonctionnement de l’ordre naturel voulu par Dieu afin de produire des signes envoyés aux hommes. Au contraire des étranges baleines et des improbables monstres pliniens, le monstre des marges polonaises laisse entendre qu’il s’agit d’un prodige. Il est un signe du Très-Haut en ce bas monde, un avertissement divin et fugitif qui « ne vesquit, que 3. heures », chargé d’admonester les « hommes mortels » ainsi que l’affirme la deuxième légende. L’idée de monstre humain a quitté l’ordre normal et ordonné de la nature pour entrer dans celui des phénomènes extraordinaires, mais signifiants, de la théologie naturelle.

D’autant que l’époque est friande d’ouvrages de tératologie.

Figure 4. Monstra humana (S. Münster, CU, 1552, p. 1151; BM Grenoble B.1979)

2. Déchiffrer le monde

En ces temps de guerre de Religion, où les luttes confessionnelles s’exacerbent, il devient urgent de déchiffrer les phénomènes extraordinaires, de développer une herméneutique du monde dans le prolongement de l’exégèse des textes saints. François de Belleforest s’y est attelé toute sa vie, d’abord aux côtés de Pierre Boaistuau[11], puis dans divers ouvrages comme l’édition de la Cité de Dieu d’Augustin – à laquelle il a participé et où il est rappelé que certains monstres « apprenne[n]t aux Chrestiens »[12] des messages divins –, jusqu’à sa traduction du Traicté des monstres d’Arnaud Sorbin, parue quelques mois avant sa mort[13].

Pour comprendre le sens belleforestien du monstre de Cracovie, il nous faut reconstituer ses pérégrinations textuelles et gnoséologiques antérieures à 1575. Le monstre semble apparaître en 1544. Le prêtre Jehan Glaumeau rapporte qu’« en icelle année [1544][14] fut grand bruict qu’ilz estoyent nez des monstres en plusieurs lieux, memement fut apourté ung protraict dung si horrible et merveilleux quil seroit difficile à descripre et disoit on quil avoit seulement vesqui quatre heures et quil avoit pronuncé telles ou semblables parolles. Amendez vous, car vostre dieu est prest a venir »[15]. Il voit dans cette naissance extraordinaire et monstrueuse un signe divin et espère que « dieu veuille que le p[re]sage soit bon »[16]. D’autres événements du même ordre seraient survenus à la cette époque comme l’étoile qui aurait traversé le ciel de Weimar et dont l’humaniste catholique Gabriel Simeoni assurait qu’une voix s’en échappait pour demander aux Saxons de se convertir. Une tempête de pluie et de sang se serait ensuite déversée sur la ville de Weimar et la terre se serait entrouverte[17]. À la même époque, Étienne Dolet mentionne le même monstre que celui de Cracovie, mais né en 1544 à Vuisering (Basse-Allemagne). Il n’aurait guère plus vécu que celui de Cracovie et aurait interpellé les contemporains par ces mots : « Faictes penitence et veillez, car le seigneur Dieu vostre maistre approche »[18].

C’est quelques années plus tard que le monstre polonais apparaît dans les éditions latine et française de 1552 de la Cosmographie universelle de Sébastien Münster[19]. Le commentaire qui accompagne la gravure dans l’édition latine, vraisemblablement signée par le poète et humaniste allemand Gaspar Bruschius de ses initiales[20], précise que le monstre serait né à Cracovie en février 1547. Après avoir affirmé que l’Afrique peut être considérée comme « la mère des monstres », Bruschius signale qu’il en a lui-même observé plusieurs sur les bords de la Vistule (qui traverse actuellement les grandes plaines polono-biélorusses). Là encore, la légende de l’édition latine affirme que ce monstre « peut avertir les hommes mortels de beaucoup de choses ». La gravure est insérée à la même place que dans la Cosmographie universelle de François de Belleforest, aux marges de la Pologne, juste avant la description de la Lituanie. Cette position marginale est corroborée par une autre remarque selon laquelle il existerait de nombreux monstres au pays des Sarmates – peuples antiques qui se situaient au nord de la mer Noire, aux marges de l’Empire romain et des Scythes –, donc une nouvelle fois au lointain, en situation d’interface anthropologique et culturelle. En effet, la description de la Lituanie par Münster (et Belleforest) tranche avec celle de la Pologne[21]. La Lituanie y apparaît sauvage, couverte de forêts et de marécages où se rencontreraient « beaucoup de sortes de bestes estranges », et ne serait parsemée que de rares villes (à l’exception de la ville épiscopale de Vilnius). Elle serait peuplée d’habitants pauvres dont l’essentiel de l’alimentation serait constituée de lait et de la viande de leurs bêtes, et qui ignoreraient toute monnaie et tout métal. Les moeurs des habitants semblent étranges puisque les femmes, comme les hommes, auraient l’obligation sociale d’avoir plusieurs partenaires sexuels. De plus, les Tatars seraient musulmans et le reste de la population animiste et idolâtre. On remarquera d’ailleurs que l’extrémité de la queue du monstre de Cracovie se termine par un croissant étrangement proche de celui de l’islam. Le monstre de Cracovie apparaît aux marges spatiales de la chrétienté et en charnière entre la Pologne et la Lituanie dans l’espace de la double page de l’ouvrage. Il relève d’une perception ethnocentrée et graduelle de l’altérité anthropologique dans des périphéries où se diluent progressivement l’humanité et la christianité. À l’instar d’Augustin qui appelait à lire le « livre du monde », expression reprise tout au long de la Renaissance, on voit bien de quelle manière l’encyclopédie géographique que constitue la Cosmographie universelle porte en son microcosme paginal l’expression et les hiérarchies du macrocosme du monde. Dans l’édition française de sa cosmographie de 1552, Sébastien Münster conserve la gravure et la totalité des descriptions à l’exception de la notice de Gaspar Bruschius (qui associait les monstres à l’Afrique). Cette partie de l’ouvrage ne connaît plus de changement jusqu’à l’édition de 1565 que reprend François de Belleforest.

Pendant ce temps, le monstre se diffuse dans la littérature savante avec Girolamo Cardano (1550)[22], Kaspar Peucer (1553)[23], Jacob Rüff (1554)[24] ou encore Conrad Lycosthenes (1557)[25]. Lorsque la reine catholique Marie Ire d’Angleterre décède en novembre 1558 et que le trône revient à la protestante modérée Élisabeth Ire, Pierre Boaistuau offre l’année suivante un exemplaire manuscrit de ses Histoires prodigieuses à la nouvelle reine[26]. Celui-ci contient une représentation et une description du monstre de Cracovie. Le discours y est clairement protestant et antipapiste, et insiste sur la dimension eschatologique des présages comme le montre l’épître dédicatoire offerte à la reine. Il y est considéré que

toutes les choses humaines qui se peuvent contempler soubs la concavité des cieux il ne se voit rien de plus excessive admiration, qui plus esveille l’esprit humain, qui ravissent plus les sens, qui plus espouvante les creatures, que les monstres, prodige, & abhominations, esquelz nous voyons des euvres de nature, non seulement renversées, mutilees, & tronquées, mais qui plus est nous y descouvrons le plus souvent un secret jugement & fleau de l’ire de Dieu par l’object des choses qui se presentent, lequel nous faict sentir la violence de la justice aspre, que nous sommes contraintz d’entrer en nous mesmes, frapper au marteau de nostre conscience, esplucher noz vices, avoir en horreur noz meffaitz, specialement quand nous lisons aux histoires sacrées, ou prophanes, que les elemens ont esté ministres de la justice de Dieu[27].

Boaistuau ajoute une légende à la gravure selon laquelle « Aucuns escrivent qu’avant que ce monstre mourust, il dist, Veillez, le Seigneur vient »[28]. Le monstre serait apparu le jour anniversaire de la conversion de Paul de Tarse sur le chemin de Damas[29]. Pour la nouvelle reine, le propos est de toute évidence à tonalité protestante et invite à une reprise en main de l’Église gallicane, ce à quoi elle s’attèle dès le début de son règne.

Ainsi, dans cette décennie 1550, la plupart des auteurs qui rapportent cette naissance monstrueuse sont clairement protestants (Peucer, Rüff, Lycosthenes, Münster, Bruschius), en sont proches comme Étienne Dolet – qui publie des ouvrages d’Érasme, de Jacques Lefèvre d’Étaples, de Pierre Robert Olivétan ou encore de Clément Marot – voire se sont vraisemblablement convertis secrètement au protestantisme (Boaistuau)[30]. Puisque ces auteurs estiment que le monstre interpelle les croyants, c’est vraisemblablement pour dénoncer des persécutions perpétrées contre les protestants. D’ailleurs, on remarquera que le monstre serait né en Pologne, en Basse-Allemagne ou dans les Pays-Bas espagnols (Lycosthenes), donc dans des régions où existent de fortes communautés protestantes. Cette gravure participe donc à la propagande iconographique réformée comme celle du « veau-moine » né à Fribourg, que rapportent Martin Luther et Philippe Melanchthon en 1523, ainsi que les créatures monstrueuses pêchées dans le Tibre et qui révéleraient la corruption de l’Église romaine. Ces images, et leur contre-propagande catholique, jouent un rôle essentiel dans les guerres de Religion[31].

Cependant, à la suite de Jehan Glaumeau et de Girolamo Cardano, les catholiques s’intéressent aussi au monstre de Cracovie. À leur adresse, Pierre Boaistuau publie en France ses Histoires prodigieuses en 1560, mais il prend la peine de retirer ses propos protestants et ses dénonciations des papes successifs[32]. Ainsi, le présage monstrueux de Cracovie demeure, avec sa dimension eschatologique, mais non sa lecture protestante. En 1575, le grand astronome et professeur de médecine à l’université de Louvain, Cornélius Gemma (fils de Gemma Frisius) y voit aussi un présage dans son De naturae divinis characterismis[33]. Cet ouvrage est publié à Anvers chez Christophe Plantin, un ami et collaborateur de Michel Sonnius, un des deux éditeurs de la Cosmographie universelle de François de Belleforest parue la même année.

3. Henri III, les protestants et la Pologne

Dès lors, comment expliquer que François de Belleforest conserve cette gravure qui est fréquemment interprétée comme une défense du protestantisme ? En effet, il ne fait aucun doute que François de Belleforest est un catholique intransigeant[34]. À de nombreuses occasions il célèbre les grands acteurs de la lutte contre les protestants à l’instar, et pour n’en citer qu’un, du théologien et archevêque de Narbonne Simon Vigor qui a accompli « de grans services a Dieu, & a son Église contre la rage furieuse des Calvinistes »[35]. François de Belleforest publie aussi en 1569 un chant funèbre en l’honneur de Sébastien de Luxembourg-Martigues qui s’est notamment illustré aux batailles de Dreux (1562) et de Moncontour (1569) contre Gaspard de Coligny et pour les décisions qu’il a prises contre les calvinistes en 1565 alors qu’il était gouverneur de Bretagne. Il fait de même pour Timoléon de Cossé, comte de Brissac et gouverneur de Picardie, qui avait activement participé aux sièges de Rouen (1562), aux côtés du duc de Guise, et de Lyon (1563), et aux batailles de Saint-Denis (1567), de Saint-Valery (1568) et de Jarnac (1569). Tous les deux sont décédés les armes à la main face aux protestants, le premier à Saint-Jean-d’Angély et le second lors du siège de Mucidan (1569)[36]. François de Belleforest refuse toutes les concessions faites aux protestants notamment à la suite du colloque de Poissy puis de l’édit de Janvier signé à Saint-Germain (1562). Son rapport au pouvoir politique est aussi très clair. Il considère que le roi doit porter « le titre de deffenseur, & fils aisné de l’Eglise […] puis que de tout temps ça esté le Roy des Françoys qui a porté la cause des Papes en main, & a deffendu les Eglises de la violence des tyrans qui les persecutoyent »[37]. Il accorde donc son plein soutien au roi légitime à la condition que celui-ci défende l’Église catholique. Il est proche des Guise et des idées des ligues catholiques qui se développent dans la décennie 1560, notamment à Agen, Bordeaux et Toulouse en 1561, face au protestantisme et à la politique de conciliation de Charles IX. En revanche, son décès en janvier 1583 nous empêche de savoir s’il aurait adhéré à la seconde Ligue qui débute l’année suivante. Enfin, on ne peut pas ignorer que François de Belleforest voit dans la violence exercée à l’égard des protestants une incontestable légitimité et un caractère purificateur[38]. Il tient à l’occasion des propos d’une grande violence par exemple lorsqu’il dénonce les « trahistres, sédicieux et rebelles » protestants qui doivent « servir de pasture aux bestes, & oiseaux de ce païs, et de graisse, & fumier a noz terres »[39], ou lorsqu’il se félicite de voir « les fleuves d’Aquitaine rougir du sang heretique » aux batailles de Jarnac et de Moncontour, et d’en appeler à « faire punir & brusler les heretiques »[40]. Son approche de la violence catholique est volontiers mystique et voit comme nombre de ses contemporains une intervention divine dans certaines manifestations naturelles comme lorsque l’aubépine aurait reverdi après la mort de Coligny lors de la Saint-Barthélemy. Plus généralement, il interprète ce type de « contresaisons » comme un avertissement divins, des « miracles de nature, faits par le tout puissant pour nous advertir de quelque extraordinaire qui no[us] devoit advenir »[41].

Enfin, pour comprendre le sens du monstre de Cracovie dans la Cosmographie universelle, il nous faut revenir au contexte politique dans lequel la France se trouve en 1574. Alors que François de Belleforest en achève l’écriture, Charles IX décède le 30 mai. Il essayait depuis plusieurs années de s’approcher du roi et avait vraisemblablement l’intention de lui dédier son ouvrage. Catherine de Médicis devient régente et le successeur légitime est Henri de Valois. Or, celui-ci a récemment été élu roi de la République des Deux Nations qui comprend le Royaume de Pologne et le Grand-duché de Lituanie[42]. Dans la Cosmographie, c’est précisément entre la description de la Pologne et celle de la Lituanie que se trouve la gravure du monstre. Le profil politique d’Henri de Valois ne devrait guère inquiéter le très catholique François de Belleforest. En effet, le roi de Pologne a combattu énergiquement les protestants à la bataille de Moncontour (1569) qui constitue selon Belleforest une « mémorable défaite » des protestants menés par l’amiral Gaspard de Coligny. Au moment même où il est élu par la diète de Varsovie, le 11 mai 1573, il est en train de combattre les protestants à La Rochelle dans un siège qui dure depuis février. Mais ce qui inquiète François de Belleforest porte sur les concessions qu’Henri de Valois a dû accepter pour être élu. En effet, si la majeure partie des paysans polonais est demeurée catholique, de nombreux nobles se sont convertis au protestantisme, plus au calvinisme qu’au luthéranisme. La Pologne passe à l’époque pour abriter de nombreux hérétiques[43]. Or, la diète exige des garanties confessionnelles de la part du prochain roi. C’est tout le travail mené par Blaise de Montluc durant les mois précédents l’élection afin de convaincre la diète polonaise du bien-fondé de la candidature d’Henri de Valois et particulièrement de faire oublier son rôle et celui de ces hommes durant la Saint-Barthélemy (24 août 1572). D’ailleurs, après avoir été informé, à la fin du mois de mai 1573, de son élection, Henri de Valois conclut un accord avec les Rochelais (24 juin) et lève le siège le 6 juillet. Il doit désormais s’engager à respecter la tolérance religieuse en Pologne-Lituanie et à lutter contre les persécutions anti-protestantes en France. Tout cela, François de Belleforest le sait bien, lui qui a traduit l’année précédente la harangue de Giovanni Francesco Commendone prononcée le 8 avril 1573 afin de plaider en faveur de la candidature française[44]. Il sait qu’Henri de Valois a célébré la sagesse de la diète, la façon dont le pays a su faire preuve de tempérance et de liberté. Ces arguments ont porté et provoqué l’adhésion des membres de la diète. Mais, avant de recevoir la couronne, il a dû signer la Pacta Conuenta et « Les Articles du Roi Henry ». Au moment de signer, Henri de Valois ne peut cacher son hésitation, au point qu’un ambassadeur de Pologne lui a glissé à l’oreille « Signabis aut non regnabis » (Ou tu signeras, ou tu ne régneras pas). Mais il a fini par signer, pour recevoir la couronne, et cela est inquiétant pour François de Belleforest. Lorsque Henri de Valois apprend le 14 juin 1574, par lettre, la mort de son frère Charles IX, il quitte quatre jours plus tard, secrètement et sans l’accord de la diète polonaise, le château royal de Wawel à Cracovie. Le doute plane sur la façon dont Henri III va traiter la question de la tolérance religieuse dans le royaume de France. C’est à ce moment que François de Belleforest met à jour sa généalogie des rois de France. Il regrette à mots cachés la faiblesse dont le défunt roi Charles IX a fait preuve face aux protestants. Il exprime ses espérances en Henri de Valois – et aussi ses craintes dans les creux de son discours – et « espere en Dieu que [le royaume de France] sera soulagé par Henri 3. du nom Roy de Pologne, auquel apartient ceste couronne de France, & pour lequel nous prions Dieu, affin qu’il luy plaise nous le ramener, et le conserver longuement a sa gloire, & pour le bien & support de toute Eglise Gallicane »[45]. Henri III arrive à Lyon le 6 septembre ; François de Belleforest termine alors sa Cosmographie et signe l’épître dédicatoire le 23 décembre 1574. Le nouveau roi Henri III n’est sacré que le 13 février 1575 alors que la cosmographie est déjà en vente chez Michel Sonius et Nicolas Chesneau à Paris, rue Saint-Jacques.

Conclusion

Si nous réunissons les pièces du puzzle, nous voyons bien que la façon dont François de Belleforest utilise le monstre de Cracovie dans sa Cosmographie universelle de 1575 relève d’une reconfessionnalisation et d’un usage politique des savoirs. Ce monstre semble avoir émergé en 1544 sous la plume d’auteurs catholiques qui y voyaient un prodige et une mise en garde des chrétiens dans le contexte des guerres de Religion qui déchiraient alors l’Europe. Lorsque Sébastien Münster l’insère dans la version latine de sa Cosmographie universelle en 1552, il l’apparente plutôt aux monstres pliniens et à leur grand nombre en Afrique dans le double contexte intellectuel de développement des sciences de la nature et de prégnance de l’auctoritas. Durant cette décennie, le monstre devient une arme aux mains des protestants pour dénoncer les persécutions dont ils sont victimes dans les régions d’Europe centrale où ils constituent une minorité importante dominée par les catholiques. C’est en ce sens que l’on peut comprendre la version française de la Cosmographie de Sébastien Münster de 1552. Une vingtaine d’années plus tard, dans son projet de réécriture catholique et de très forte augmentation de l’ouvrage, François de Belleforest se réempare de cette gravure pour tenir un propos cryptique face à un nouveau roi dont il ne connaît pas les intentions, mais dont il craint les engagements récents en Pologne, sans pour autant que le cosmographe n’énonce clairement ses propres doutes. Par la puissance et la polysémie de l’image, il suggère à bas bruit ce que de nombreux catholiques intransigeants pensent comme lui, mais qu’ils ne peuvent explicitement exprimer face au nouveau roi Henri III. Finalement, ici se croisent une acception spatiale de l’altérité anthropologique des périphéries de la chrétienté et l’espace paginal, les savoirs antiques et contemporains, les préoccupations naturalistes et les usages confessionnels et politiques de la tératologie, et les discours faussement distanciés sur le lointain conçus pour éclairer secrètement l’hic et nunc des angoisses eschatologiques et des réalités politiques. L’ensemble révèle fondamentalement les relations intimes et complexes entre le croire et le savoir.



*Étienne Bourdon est Maître de conférences à l’université Grenoble Alpes en histoire moderne et spécialiste de l’histoire des savoirs de la Renaissance au XIXe siècle. Il travaille actuellement sur les relations entre savoirs, pouvoirs et religion à l’époque moderne, particulièrement sur les savoirs historiques, cosmographiques et géographiques. Il est notamment l’auteur de Le Voyage et la découverte des Alpes. Histoire de la construction d’un savoir, 1492-1713 (PUPS, 2011, prix Georges Goyau de l’Académie française en 2013). Il a récemment dirigé deux numéros de revues, l’un sur « Nos ancêtres les Gaulois ! » Usages politiques de l’histoire de l’Antiquité à la Ve République (Parlement[s], Revue d’histoire politique, n° 32, juin 2020), et « Penser les savoirs géographiques à l’époque moderne (XVe–XIXe siècle) » (Revue de Géographie Historique, n° 17-18, novembre 2020-mai 2021). Il vient d’écrire un ouvrage sur François de Belleforest, Le combat par la plume. Fran­çois de Belleforest et les guerres de Religion (Paris, Classiques Garnier) et un autre intitulé Croire et savoir. L’invention du monde à la Renaissance (Paris, Les Belles Lettres), tous deux à paraître prochainement. Etienne.Bourdon@univ-grenoble-alpes.fr, ORCID: https://orcid.org/0000-0003-0173-181X


Bibliographie

Sources primaires

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Belleforest, François de, Chant funèbre sur la mort et trespas de... messire Sebastien de Luxembourg, comte de Martigues, Paris, Jean Hulpeau, 1569

Belleforest, François de, Déploration de la France sur la mort de... Timoléon de Cossé, comte de Brissac, Paris, Jean Hulpeau, 1569

Belleforest, François de, Discours des présages, Paris, Robert Magnier et Vincent Norment, 1568

Belleforest, François de, Discours sur les rebellions auquel est contenu qu’elle est la misère qui accompagne les trahistres, sédicieux et rebelles, et les récompenses qui les suivent selon leurs rebellions, Paris, Jean Hulpeau, 1572

Belleforest, François de, Cosmographie universelle, Paris, Nicolas Chesneau et Michel Sonius, 1575

Boaistuau, Pierre, Histoires prodigieuses, [1559] (Londres, Wellcome Library, ms. 136)

Boaistuau, Pierre, Histoires prodigieuses les plus mémorables qui ayent esté observées depuis la nativité de Jésus-Christ jusques à nostre siècle, Paris, Vincent Sertenas, Jean Longis, Robert Le Mangnier, 1560

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Dolet, Étienne, Sommaire et recueil des faictz et gestes, [s. n., s. l.], 1543 (BnF, Rés LB 30-3)

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Magnus, Olaus, Carta marina et descriptio septemtrionalium terrarum ac mirabilium rerum in eis contentarum deligentissime elaborata Anno Dni 1539, Licopen [sic] Veneciis, Thomas de Rubis, 1539

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Paré, Ambroise, Deux livres de chirurgie. I. De la génération de l’homme, & manière d’extraire les enfans hors du ventre de la mère, ensemble ce qu’il faut faire pour la faire mieux, & plus tost accoucher, avec la cure de plusieurs maladies qui luy peuvent survenir ; II. Des monstres tant terrestres que marins, avec leurs portrais. Plus un petit traité des plaies faictes aux parties nerveuses, Paris, André Wechel, 1573 (éd. critique et commentée par Jean Céard, Des monstres et prodiges, Genève, Droz, 1971)

Peucer, Kaspar, Commentarius de praecipuis diuinationum generibus, Wittenberg, [Johann Krafft], 1553 (trad. fr. Les Devins, ou Commentaire des principales sortes de devinations..., Lyon, Barthelemi Honorati, 1584)

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Sources secondaires

Bourdon, Étienne, Le combat par la plume. François de Belleforest et les guerres de Religion, Paris, Classiques Garnier, 2025

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Couriol, Etienne et Teresa Hiergeist, Monstres et christianisme ¬ monstres du christianisme XVIe–XVIIIe siècles, Berlin, P. Lang, 2018

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Notes de bas de page

  1. F. De Belleforest, Cosmographie universelle, Paris, N. Chesneau et M. Sonius, 1575, I, 2, 1690, 1720-1722. [L’ouvrage est désormais noté CU].
  2. J. Céard, « Tératologie et tératomanie au XVIe siècle », in M.-T. Jones-Davies (dir.), Monstres et prodiges au temps de la Renaissance, Paris, Centre de recherches sur la Renaissance, diffusion J. Touzot, 1980, p. 5-16 ; J. Céard, La nature et les prodiges. L’insolite au XVIe, Genève, Droz ; Paris, [diffusion Champion], 1996, p. 294 ; J.-C. Margolin, « Sur quelques prodiges rapportés par Conrad Lycosthènes », ibid., p. 42-54.
  3. CU, I, 2, 1815.
  4. O. Magnus, Carta marina et descriptio septemtrionalium terrarum ac mirabilium rerum in eis contentarum deligentissime elaborata Anno Dni 1539, Licopen [sic] Veneciis, T. de Rubis, 1539 ; O. Magnus, Historia de gentibus septentrionalibus, Romae, [J. M. De Viottis], 1555. Voir P.-A. Salvadori, Le Nord de la Renaissance. La carte, l’humanisme suédois et la genèse de l’Arctique, Paris, Classiques Garnier, 2020.
  5. J. Nicot, Thresor de la langue françoise, tant ancienne que moderne, Paris, D. Douceur, 1606, p. 416 ; M. de Montaigne, Essais, II, I et XI. Montaigne qualifie en ce sens les baleines de monstres (« l’horrible chaos de la bouche de ce monstre », II, XII).
  6. A. Paré, Deux livres de chirurgie. I. De la génération de l’homme, & manière d’extraire les enfans hors du ventre de la mère, ensemble ce qu’il faut faire pour la faire mieux, & plus tost accoucher, avec la cure de plusieurs maladies qui luy peuvent survenir ; II. Des monstres tant terrestres que marins, avec leurs portrais. Plus un petit traité des plaies faictes aux parties nerveuses, Paris, André Wechel, 1573 (voir éd. critique et commentée par J. Céard, Des monstres et prodiges, Genève, Droz, 1971).
  7. L. Verner, The epistemology of the monstrous in the Middle Ages, New York, Routledge, 2005 ; J. Block Friedman, The monstrous races in medieval art and thought, Syracuse (N. Y.), Syracuse university press, 2000 ; D. Williams, Deformed discourse. The function of the monster in mediaeval thought and literature, Montreal & Kingston, McGill-Queen’s university press, 1996 ; J. Céard, La nature et les prodiges. L’insolite au XVIe, op. cit., ; C. Lecouteux, Les monstres dans la pensée médiévale européenne, Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 1993.
  8. F. Lestringant, P.-F. Moreau et A. Tarrête (dir.), L’unité du genre humain. Race et histoire à la Renaissance, Paris, PUPS, 2014.
  9. CU, II, 1793.
  10. CU, II, 1588.
  11. P. Boaistuau, Histoires prodigieuses les plus mémorables qui ayent esté observées depuis la nativité de Jésus-Christ jusques à nostre siècle, Paris, V. Sertenas, J. Longis, R. Le Mangnier, 1560.
  12. Augustin, De la cité de Dieu, [...] enrichy de plusieurs annotations et observations en marge, servant à la conference et intelligence des histoires anciennes et modernes, par François de Belle-Forest, Comingeois, Paris, N. Chesneau, 1570, rééd. 1585, p. 300.
  13. A. Sorbin, Traicté des monstres, Traduit de Latin de François par François De Belleforest, Paris, J. de Marnef et la Vve de G. Cavellat, 1582.
  14. En fin d’année 1543 (a. s.), soit en début d’année 1544 (n. s.).
  15. J. Glaumeau, Journal tenu par Jean GLAU-MEAU, prêtre, né en 1517, à Nouhan le Ferron en Touraine, des événements survenus à Bourges pendant les années 1541-1562, f° 16 r° – 16 v° (Paris, Bibliothèque nationale, Ms fr. 14380). La transcription et l’édition qui ont été données en 1867 de son Journal (Bourges, Just-Bernard, 1867), et auxquelles J. Céard et D. Crouzet se réfèrent, sont partiellement fautives (erreurs orthographiques et mots manquants).
  16. Ibid.
  17. Voir D. Crouzet, Les guerriers de Dieu, Seyssel, Champ Vallon, 1990, t. 1, p. 362-365.
  18. É. Dolet, Sommaire et recueil des faictz et gestes, [s. n., s. l.], 1543 (BnF, Rés LB 30-3 ; cité par J. Céard, La nature et les prodiges. L’insolite au XVIe, op. cit., p. 125, n. 18).
  19. S. Münster, Cosmographia uniuersalis, Basileae, H. Petri, 1552, p. 905 ; ed. fr., p. 1122.
  20. P. Boaistuau, Histoires prodigieuses, op. cit., p. 19.
  21. S. Münster, Cosmographie universelle, Basileae, H. Petri, 1565, p. 1032.
  22. G. Cardano, De Subtilitate libri XXI, Norimbergae, J. Petreium, 1550.
  23. K. Peucer, Commentarius de praecipuis diuinationum generibus, Wittenberg, [J. Krafft], 1553 ; trad. fr. Les Devins, ou Commentaire des principales sortes de devinations..., Lyon, B. Honorati, 1584, p. 641.
  24. J. Rüff, De conceptu et generatione hominis, Tiguri, C. Froschouerus, 1554.
  25. C. Lycosthenes, Prodigiorum ac ostentorum chronicon, quae praeter naturae ordinem, Bâle, H. Petri, 1557, f° 20 r° – 20 v°.
  26. P. Boaistuau, Histoires prodigieuses, [1559], conservé à Londres, Wellcome Library, ms. 136. Il ne semble cependant pas que ce manuscrit ait été finalement remis à la reine Élisabeth.
  27. Ibid., f° 3 v° 4 r°.
  28. Ibid., f° 30 v°.
  29. Pour une discussion concernant cette date, voir É. Bourdon, Croire et savoir. L’invention du monde à la Renaissance, Paris, Les Belles Lettres, 2022 (à paraître).
  30. Nous suivons ici l’hypothèse de S. Bamforth d’une conversion secrète au protestantisme de P. Boaistuau (voir P. Boaistuau, op. cit., 2010).
  31. E. Couriol et T. Hiergeist, Monstres et christianisme – monstres du christianisme XVIe–XVIIIe siècles, Berlin, P. Lang, 2018 ; D. Crouzet, Les guerriers de Dieu, op. cit. ; J. S. Spinks, Monstrous births and visual culture in sixteenth-century Germany, London, Pickering & Chatto, 2009, p. 100-104 ; W. Shumaker, The Occult sciences in the Renaissance, a study in intellectual patterns, Berkeley ; Los Angeles ; London, University of California Press, 1972, p. 95 notamment.
  32. P. Boaistuau, Histoires prodigieuses, op. cit., 1560, p. 18.
  33. C. Gemma, De naturae diuinis characterismis, Antuerpiae, C. Plantini, 1575, p. 172-175.
  34. M. Simonin, Vivre de sa plume au XVIe siècle ou la carrière de François de Belleforest, Genève, Droz, 1992 ; P. Debofle, François de Belleforest, 1530-1583. Un écrivain de Samatan au siècle de l’Humanisme et des guerres de religion, Samatan, Association Autour de François de Belleforest, 1995 ; É. Bourdon, Le combat par la plume. François de Belleforest et les guerres de Religion (à paraître).
  35. CU, I, 1, p. 353.
  36. F. de Belleforest, Chant funèbre sur la mort et trespas de... messire Sebastien de Luxembourg, comte de Martigues, Paris, J. Hulpeau, 1569 ; F. de Belleforest, Déploration de la France sur la mort de... Timoléon de Cossé, comte de Brissac, Paris, J. Hulpeau, 1569.
  37. CU, I, 1, p. 262.
  38. D. Crouzet, Les guerriers de Dieu, op. cit., 2005 [1990].
  39. F. de Belleforest, Discours sur les rebellions auquel est contenu qu’elle est la misère qui accompagne les trahistres, sédicieux et rebelles, et les récompenses qui les suivent selon leurs rebellions, Paris, J. Hulpeau, 1572.
  40. CU, I, 1, p. 262.
  41. F. de Belleforest, Discours des présages, Paris, R. Magnier et V. Norment, 1568, f° 29 v°.
  42. N. Le Roux et C. Magnien-Simonin (dir.), « Henri roi de Pologne », Seizième siècle, 2018, 14.
  43. J. Lecler, Histoire de la tolérance au siècle de la Réforme, Paris, A. Michel, 1994, l. V, La Pologne, « Asile des hérétiques » au XVIe siècle, p. 354-398.
  44. G. F. Commendone, Harangue de illustrissime et révérendissime seigneur Jean-François Commendon, cardinal de la S. Église romaine... Prononcée au camp de Warszavie devant le Conseil & noblesse de Poloigne, le huictiesme d’avril 1573, translaté de latin en françois, par F. de Belleforest, Paris, T. Brumen, 1573.
  45. CU, I, 1, p. 262.

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Received: 15.01.2024. Accepted: 18.01.2024.