ACTA UNIVERSITATIS LODZIENSIS
Folia Litteraria Romanica 20(1) 2025

DOI: https://doi.org/10.18778/1505-9065.20.1.01

Mauvaises paroles / bonnes paroles Comment dit-on du mal / du bien de personnes, de choses et de phénomènes en utilisant les différents registres de langue ?

Avant-propos

Les articles réunis dans cet ouvrage abordent sous divers angles – notamment linguistique, analyse du discours, littérature, didactique des langues et traduction – la question de la bonne et de la mauvaise parole, afin d’en dégager les particularités formelles, sémantiques, pragmatiques et discursives.

La « mauvaise parole » est fréquemment associée à une forme de violence verbale ou de transgression, tandis que la « bonne parole » tend à être perçue comme un discours neutre, voire euphémisant. Toutefois, cette dichotomie apparente est loin d’être universelle : ce qui est tenu pour un discours acceptable ou bienveillant dans une communauté peut être perçu comme déplacé, voire agressif, dans une autre.

Le présent volume interroge ainsi la relativité des jugements de valeur exprimés dans le langage. Il propose une réflexion transversale sur les mécanismes par lesquels les langues construisent, modulent ou contestent les représentations positives et négatives. Plus précisément, il examine les manières de dire du bien et du mal dans différentes cultures, les procédés de création lexicale propres aux paroles valorisantes ou stigmatisantes et les stratégies expressives mobilisées dans l’éloge et le blâme. Il s’intéresse également à la représentation du bien et du mal dans les textes littéraires, ainsi qu’à la dynamique des paroles bonnes ou mauvaises dans différents argots, en lien avec leurs contextes culturels. Enfin, il analyse les usages spécifiques que font les jeunes et les internautes des discours évaluatifs, souvent marqués par l’innovation, le détournement ou la provocation.

En croisant les perspectives disciplinaires et les approches contrastives – en particulier dans le cadre des langues française, polonaise et tchèque – les études présentées ici mettent en lumière les tensions constitutives entre norme et usage, entre évaluation et subjectivité, entre innovation linguistique et reproduction de stéréotypes. Elles apportent ainsi un éclairage renouvelé sur le rôle central de la parole évaluative dans la dynamique des langues et des constructions sociales.

Afin d’assurer une organisation claire et accessible, et d’éviter toute forme de préférence, les articles réunis dans ce numéro ont été classés par ordre alphabétique, ce qui facilite leur consultation. Cette disposition vise à garantir une lecture équitable et fluide, tout en valorisant la diversité des contributions présentées.

Ainsi, dans sa contribution, Anna Bochnakowa (Université Jagellonne, Cracovie, Pologne) s’attache à examiner comment les mots bon/-ne, mauvais/-e, bien, mal participent à la formation de nouvelles unités lexicales et modifient le sens du mot ayant servi de point de départ. À partir d’une analyse fondée sur le Petit Robert ainsi que sur un corpus d’expressions françaises relevées en ligne, elle met en évidence le rôle joué par ces termes, dont la signification initiale est de nature morale, dans l’évolution sémantique des mots composés auxquels ils s’adjoignent. Son analyse éclaire également leur fonctionnement au sein des formules figées.

Élise Cantiran (Université Eötvös Loránd, Budapest, Hongrie) rappelle que dans l’imaginaire collectif, la figure d’Émile Zola demeure étroitement liée à la représentation du Second Empire dans Les Rougon-Macquart, à sa fidélité historique, à sa peinture des mœurs ou à sa précision technique – bien plus rarement, toutefois, aux traits d’esprit disséminés dans ses écrits, qu’ils soient épistolaires, journalistiques ou romanesques. Elle montre comment, dans ses lettres, Zola se plaint souvent auprès de ses amis, confrères ou collaborateurs d’être la cible de propos malveillants, ou d’être simplement mal compris. Les années 1876 et 1877 marquent un tournant : c’est l’époque de la rédaction et publication de L’Assommoir, dont Le Bien Public arrête le feuilleton après avoir, selon l’auteur, tenté d’en censurer quelques passages. Ce dernier réagit avec une palette d’expressions issues de registres de langue variés, parfois imagées, qui entrent en résonance avec la matière romanesque elle-même. L’étude de Cantiran propose une lecture croisée de la correspondance de Zola et du texte romanesque, dans lequel Gervaise, son héroïne, est l’objet de paroles hostiles. Elle mobilise à cette fin les outils de l’analyse épistolaire (Humphries, Bouzinac, Diaz), ainsi que ceux de la théorie de l’énonciation (Kerbrat-Orecchioni, Maingueneau, Charaudeau).

L’article d’Anne-Caroline Fiévet (EHESS Paris, France) est consacré à la radio, et plus particulièrement aux émissions de libre antenne diffusées sur la station destinée à un public jeune, Skyrock. Une telle situation de communication à la fois médiatique (car ancrée dans l’espace public) et privée (en raison des thématiques centrées sur les préoccupations des jeunes) favorise l’émergence d’un collectif aux valeurs partagées et revendiquées. Ces dernières se manifestent notamment par l’usage du tutoiement, des prénoms ou pseudonymes, ainsi que par la forte présence de l’animateur principal, qui distribue les tours de parole et reformule les propos dans une logique de cadrage. Mais surtout, ces émissions sont le lieu d’un déplacement des normes langagières, marqué par le recours à des formes d’expression argotique et à l’insulte. Fiévet étudie un corpus de cinq émissions datant de 2003, 2013 et 2023, et analyse le lexique argotique mobilisé pour qualifier, de manière positive ou négative, des figures masculines ou féminines.

Anne Gensane (Université d’Artois, Arras, France) inscrit sa recherche dans la continuité de ses travaux en sociolexicologie de la poésie francophone, en s’intéressant ici au recours à un lexique non standard dans l’œuvre poétique de Lil Boël (nom de plume d’Héloïse Émilienne Bricoteaux, 1900-1982). Connue de manière marginale pour sa brève carrière d’actrice et de scénariste au cinéma (de 1947 à 1950), elle est avant tout l’auteure d’une œuvre littéraire singulière. L’étude porte en particulier sur le recueil Fosse commune des misères (1942), dans lequel l’écrivaine mobilise une parole poétique ancrée dans des usages linguistiques non standard, parfois perçus comme des formes de « mauvais usage ». Pour Gensane, en recourant à ces « mauvaises paroles », Boël parvient paradoxalement à faire émerger de « bonnes paroles », car la manière dont elle montre les stigmates – à la façon d’une montreuse de foire – permet de conférer une visibilité singulière à sa propre fosse commune des misères, élevant ainsi la marginalité langagière au rang d’expression poétique et politique.

Jean-Pierre Goudaillier (Université de Paris, France) explique que, d’un point de vue diatopique et diastratique, le pataouète est le basilecte du français pied-noir d’Algérie, apparu et parlé, entre autres, dans des quartiers populaires d’Alger pendant la colonisation, entre la seconde moitié du XIXe et le début du XXe siècle. Il se distingue de deux autres basilectes régionaux : le chapourlao ou chapourrao à l’ouest, et le tchapagate à l’est. Son lexique comporte de nombreux emprunts, entre autres à l’arabe, l’espagnol et l’italien, ainsi que des créations propres (algérianismes) qui comprennent des transpositions d’expressions étrangères, des spécialisations (glissements) et extensions de sens de termes d’origine étrangère. Il en va de même pour les insultes et injures, où l’on relève la présence à la fois de termes français et empruntés. On retrouve des termes insultants et/ou injurieux dans des écrits, entre autres, de Paul Achard, Roland Bacri, Edmond Brua, Musette (pseudonyme d’Auguste Robinet), Robert Randau, voire Albert Camus.

L’étude de Stéphane Hardy (Université de Siegen, Allemagne) porte sur les noms d’oiseaux utilisés comme termes d’injure en français familier et argotique. Dans la plupart des cas, ces noms sont utilisés pour désigner des défauts humains ou des habitudes vicieuses : ainsi, poule mouillée qualifie un individu excessivement peureux ; une personne qui fait preuve de stupidité et d’ignorance est une triple buse, une oie, une dinde, une bécasse ou encore une personne dotée d’une cervelle de moineau ; quant à une personne manquant d’expérience, maladroite et nigaude, elle peut être traitée de serin, de pigeon ou d’oie blanche, etc. Ces usages révèlent l’existence d’une société humaine métaphorique composée d’espèces aviaires, où les oiseaux deviennent les vecteurs d’une animalisation symbolique des comportements humains. L’analyse met ainsi en lumière la richesse figurative et l’ancrage sociolinguistique de ces injures à travers le prisme du bestiaire populaire.

Małgorzata Izert (Université de Varsovie, Pologne) propose une étude fondée sur le corpus visant à analyser le fonctionnement de certains collocatifs intensifieurs se réalisant par un patron syntaxique précis, à savoir la construction comme + SN, qui suit un adjectif servant de base à la collocation. Ce type de phrasèmes collocationnels, particulièrement adapté aux noms ayant le trait sémantique [+humain], permet d’exprimer, outre l’intensification d’une propriété, une émotion négative et une évaluation péjorative que le locuteur cherche à partager avec son interlocuteur. À la nuance intensive et expressive s’ajoute également une dimension évaluative subjective de dépréciation exprimé – ou non – sur le ton de la plaisanterie par le locuteur. La valorisation négative des phrasèmes du corpus peut procéder de plusieurs mécanismes : d’une subjectivité lexicalisée, comme dans muet comme une carpe ; d’une péjoration intrinsèque portée simultanément par l’adjectif (base) et par le comparant (collocatif), comme dans méchant comme la gale ; ou encore d’une valeur péjorative de l’adjectif suivi d’un comparant neutre qui devient évaluatif axiologique négatif grâce au procédé de comparaison, comme dans con comme un panier.

Agnieszka Janion (Université de Varsovie, Pologne) consacre son étude à un format spécifique de streaming : les émissions de jeux vidéo en direct, au cours desquelles le joueur réalise une session de jeu tout en interagissant avec les spectateurs. Si le déroulement du jeu constitue le cœur de ce type de contenu, une attention particulière est portée à la séquence d’ouverture, moment stratégique où le streamer accueille son public, l’incite à s’abonner ou à le suivre, et présente le contenu du « rendez-vous ». C’est dans cette phase introductive que le travail de construction identitaire et de mise en scène de soi se révèle le plus intense, à travers l’affirmation d’opinions, la réception – favorable ou critique – des idées formulées par les spectateurs, et la gestion de la relation avec l’audience. L’auteure décrit les expressions et termes à valeur affective et évaluative, par lesquels les streamers portent un jugement d’appréciation, de dépréciation ou témoignent d’une affection. Par une comparaison entre les pratiques langagières des streamers français et polonais, elle met en évidence des différences notables dans le choix lexical, la forme des marques subjectives et l’intensité qui s’en dégage. Cette analyse contrastive éclaire ainsi les dynamiques de subjectivité et de représentation de soi propres à des contextes culturels et linguistiques distincts.

La recherche d’Ewa Pilecka et Tomasz Januchta (Université de Varsovie, Pologne), effectuée à partir des corpus de la famille TenTen accessibles via Sketch Engine, et complétée par des données issues du web francophone et polonophone recueillies via Google, porte sur la « mauvaise parole » ciblant l’intelligence, ou plutôt son absence, en français et en polonais. Plus précisément, elle s’intéresse aux structures sémantico-cognitives basées sur la comparaison, mais qui, en surface, dévient des formes canoniques telles que « (être) bête comme SN ». L’étude approfondit notamment une structure déjà analysée par l’autrice pour le français, à savoir « (avoir) le QI d’un(e) N » (p.ex. (avoir) le QI d’une huître, d’un mollusque, d’un pot à yaourt...), ainsi que d’autres expressions apparentées, intégrant des quasi-synonymes de QI, tels qu’intelligence, cerveau, cervelle. Le nom N inséré dans ce moule syntaxique appartient à une série des parangons de bêtise culturellement conditionnés. La recherche propose ainsi une comparaison des paradigmes des N parangons en français et en polonais afin d’évaluer dans quelle mesure ces listes se recouvrent ou divergent. Enfin, le dernier volet de l’étude porte sur les procédés linguistiques destinés à renforcer le caractère injurieux de la comparaison, notamment par l’ajout d’éléments « surintensifiants ».

L’étude de Filip Kolecki (Université de Łódź, Pologne) s’intéresse à l’analyse des verbes néologiques en français fondée sur une approche de linguistique de corpus appliquée à de grands corpus de presse. Ces données ont été collectées via la plateforme Néoveille, qui recense des unités verbales produites ces dernières années et classées comme néologismes candidats. Une étape de vérification est effectuée à l’aide du logiciel Sketch Engine, permettant de replacer les exemples dans des contextes sémantiques plus larges. L’analyse sémantique, approfondie par une perspective pragmatique, met en lumière la manière dont ces verbes néologiques participent à la valorisation de la perception d’un énoncé par l’interlocuteur, qu’elle soit positive ou négative.

L’étude à la fois théorique et empirique de Radka Mudrochová, Tomáš Závodský et Jana Urbanová (Université Charles, République tchèque) porte sur l’emploi des insultes en tchèque et en français. Ces expressions, envisagées comme un acte de langage vulgarisant, englobent des termes grossiers, employés de manière ciblée par le locuteur pour insulter, ridiculiser ou dénigrer. L’analyse examine leurs fonctions sociales et leur classification dans une perspective socioculturelle et linguistique, soulignant leur rôle dans la transgression des normes sociales et l’usage de mots tabous. Une enquête auprès de plus de cent locuteurs natifs révèle que les Français privilégient les insultes à caractère sexuel, tandis que les Tchèques préfèrent celles impliquant des noms d’animaux. Les auteurs mettent aussi en lumière les difficultés de traduction liées aux divergences sémantiques, notant que les insultes sexuelles sont généralement mieux traduites que les insultes animalières.

L’étude d’Andrzej Napieralski et Lena Czerwińska (Université de Łódź, Pologne) vise à explorer les formes d’expression du jugement moral – ce qui est considéré comme « bien » ou « mal » – dans les textes récents de rappeurs français et polonais. L’objectif est d’identifier les thématiques valorisées ou critiquées, ainsi que les marques lexicales relevant de la « mauvaise parole » (injures, insultes, vulgarismes). Cette analyse permet de dégager les similitudes et différences dans les représentations du « bien » et du « mal » entre la France et la Pologne, deux pays où la culture hip-hop est solidement implantée. L’étude contribue ainsi à une meilleure compréhension des dynamiques socioculturelles et linguistiques contemporaines, en éclairant l’évolution des normes et valeurs véhiculées par le rap.

Laurent Canal et Alena Podhorná-Polická (Université Masaryk, Brno, République tchèque) examinent la notion d’argot, au centre de jugements de valeur profondément contrastés. Tandis que les puristes en déconseillent l’usage, le considérant, depuis une perspective normative, comme une nuisance, voire une menace, pour la langue, les argotiers (usagers réguliers de l’argot) le valorisent comme une forme de langue émancipée des hiérarchies discursives, perçue comme source d’enrichissement et de liberté linguistique. À partir de ces deux opinions contradictoires, voire antagonistes, une double subjectivité quasi-pathologique s’est répandue dans toutes les strates sociales françaises séparant les « argotophobes » des « argotolâtres », selon la terminologie de Jean-Pierre Goudaillier. Cette étude interroge les éléments langagiers susceptibles de soutenir ou de véhiculer cette dichotomie dans les définitions lexicographiques françaises et tchèques du terme argot, confrontées aux résultats issus d’un corpus électronique. L’objectif est de mettre en évidence d’éventuelles corrélations entre ces définitions et l’imaginaire argotique des locuteurs, et l’expression de jugements axiologiques (négatifs, positifs ou neutres). Enfin, sont également étudiés les procédés traductifs du terme argot et des lexèmes associés (notamment jargon et jargot) du français vers le tchèque, langue disposant d’une palette dénominative est plus nuancée (argot, slang, profesní mluva, hantýrka, žargon).

Olga Stepanova Desfeux (Pléiade, Université Sorbonne Paris Nord, France) s’intéresse aux effets des inégalités socio-spatiales entre centres urbains et périphéries, souvent à l’origine de désordres et de révoltes qualifiés dans les discours médiatiques de « violences urbaines », généralement attribuées aux jeunes des banlieues. À travers les récits d’écrivains issus de l’immigration (Habiba Mahany, Mohamed Razane, Thomté Ryam), cette violence apparaît comme une expérience destructrice, nourrie par le racisme, la marginalisation, les conflits territoriaux ou identitaires et les tensions avec les autorités. Peu explorée en sociolinguistique, la violence verbale s’y manifeste par un lexique stigmatisant (insultes sexistes, homophobes, racistes, propos dévalorisants). L’analyse de Stepanova Desfeux met également en lumière un rapport étroit entre langage et construction genrée des identités dans les espaces périphériques, où la masculinité s’ancre dans une virilité normative, entraînant la stigmatisation de ceux et celles qui en dévient.

Le dictionnaire hongrois-français, élaboré au printemps 2000 par Dávid Szabó (Université Eötvös Loránd, Budapest, Hongrie), dans le cadre de sa thèse doctorale portant sur l’argot des étudiants budapestois (publiée chez L’Harmattan en 2004), constitue le point de départ de l’étude présentée conjointement avec Máté Kovács (même université). Ce dictionnaire recense un nombre significatif de mots pour dire bien : thématique qui arrive en troisième position parmi les thèmes majeurs de l’argot des étudiants budapestois dans le corpus de 2000. En revanche, les expressions renvoyant au mal y sont sensiblement moins nombreuses, suggérant une caractéristique spécifique de l’argot des étudiants, voire plus largement de la langue des jeunes. L’article poursuit un double objectif : d’une part, évaluer la persistance et la fréquence d’usage des unités lexicales identifiées il y a plus de vingt ans ; d’autre part, identifier les « nouveaux » mots d’argot commun employés pour exprimer les notions de « bien » et de « mal », à partir d’un corpus recueilli au moyen d’une enquête en ligne menée auprès de jeunes locuteurs hongrois. Cette recherche permet ainsi d’appréhender l’évolution diachronique de l’argot commun hongrois, avec un accent particulier sur son emploi évaluatif.

Camille Vorger (Université de Lausanne, Suisse), analyse l’expression quoicoubeh, largement répandue dans les écoles et lycées. Afin d’étudier ce jeu de langage, elle s’appuie sur plusieurs sources : une enquête réalisée auprès de parents d’élèves d’une école élémentaire française, les réponses à un questionnaire adressé à Bernard Cerquiglini concernant l’éventuelle inclusion de ce néologisme dans la nouvelle édition du dictionnaire Larousse, ainsi qu’un corpus de discours médiatiques francophones ayant relayé et commenté cette expression. Elle met en lumière un caractère spécifique de ce phénomène : expression ludique et piégeante, quoicoubeh illustre un usage jeune et codifié du langage, marqué par une créativité langagière sans transgression des normes sociales.

La recherche d’Agnieszka Woch se focalise sur les représentations métaphoriques des phénomènes liés à la pandémie, présentes dans les discours négationnistes de la COVID-19. L’étude analyse les caractéristiques spécifiques de cette rhétorique, notamment les métaphores conceptuelles, en particulier celles mobilisant sur les sèmes de la lutte, figures récurrentes dans les discours de santé publique et politiques. L’auteure examine également la visée persuasive de ces figures de discours et leur mode d’emploi. Le corpus repose sur des commentaires, souvent dysphémiques, relevés entre février 2020 et décembre 2022 sur quatre groupes Facebook – deux polonais et deux français – exprimant leur opposition aux mesures sanitaires et abordant des sujets tels que la pandémie, le port du masque, les gestes barrières, les traitements, les vaccins antiviraux ou le milieu médical.

Finalement, l’article de Dariusz Bralewski engage une polémique autour de l’ouvrage d’Agnieszka Piela, Literatura źródłem związków frazeologicznych. Słownik, publié par les éditions UŚ à Katowice en 2024.


Nous espérons que ce numéro offrira au lecteur un éclairage approfondi sur les diverses modalités par lesquelles les langues expriment les jugements de valeur et mettra en lumière la richesse des perspectives théoriques ainsi que des contextes d’analyse des articles qui le composent. Bonne lecture !

Jean-Pierre Goudaillier
Anna Bobińska