ACTA UNIVERSITATIS LODZIENSIS
Folia Litteraria Romanica 18, 2023
https://doi.org/10.18778/1505-9065.18.12

Joanna Kopeć* Orcid

Université de Łódź

Maîtriser le lexique des émotions à travers la métaphore. Une démarche socio-affective et socio-cognitive dans la construction de la compétence rédactionnelle à l’université

RÉSUMÉ

Cette contribution est centrée sur l’enseignement-apprentissage du lexique émotionnel lié aux concepts de solitude et de silence, en vue du développement de la compétence rédactionnelle en français langue étrangère au niveau avancé (B2). L’auteure applique la théorie de la métaphore conceptuelle de Lakoff et Johnson (1980) à l’enseignement-apprentissage du lexique émotionnel sémantiquement imprédictible, mais métaphoriquement motivé. L’article présente le déroulement et les résultats d’une courte expérimentation didactique menée au sein d’un groupe d’étudiants de licence en philologie romane. L’expérimentation questionne l’efficacité de l’approche socio-affective et socio-cognitive qui a eu pour but non seulement le développement des compétences lexicales, rédactionnelles et créatives mais aussi le tissage de liens affectifs entre les étudiants eux-mêmes, et entre l’enseignante et les étudiants durant le confinement dû au COVID-19 et l’enseignement-apprentissage en ligne. L’auteure propose un parcours didactique autour d’activités réflexives et celles d’écriture créative, intégrant respectivement le lexique émotionnel. L’expérimentation a démontré que le fait d’être conscient de la motivation métaphorique des expressions idiomatiques relatives aux émotions permet aux apprenants de mieux mémoriser, utiliser et organiser le lexique étudié ainsi que d’être plus créatifs. Malgré les avantages incontestables de l’approche présentée, son potentiel didactique devrait être testé à long terme et avec un plus grand nombre d’apprenants.

MOTS-CLÉS — métaphore conceptuelle, le lexique émotionnel, motivation métaphorique, didactique de l’écrit, didactique du lexique

Mastering the Language of Emotions Through Metaphor: A Socio-Affective and Socio-Cognitive Approach to Building Writing Skills at the University Level

SUMMARY

The author demonstrates how to develop and improve the writing competence of French language students at an advanced level (B2), drawing on selected examples of the language of emotions and the concepts of SILENCE and SOLITUDE. The article successfully applies Conceptual Metaphor Theory, initiated by Lakoff and Johnson (1980), to teaching and learning the French vocabulary of emotions as usually being not predictable but metaphorically motivated. A short experiment has been carried out in a group of French-philology undergraduate students. The experiment has been designed to examine the effectiveness of the socio-affective and cognitive approach aimed at developing not only lexical competence, writing skills, and creativity, but also the affective relations among students themselves and between the teacher and students while under lockdown during the COVID-19 pandemic accompanied by online teaching. The experiment shows that being aware of metaphorical motivations behind idiomatic expressions of emotions allows students not only to better learn, use, and organise new vocabulary, but also to be more creative. The author proposes some writing exercises to be used in classroom instruction. Despite the undeniable advantages of the proposed approach, its pedagogical potential should be tested on more data and on a longer-term basis.

KEYWORDS — conceptual metaphor, the language of emotions, metaphorical motivation, teaching writing, teaching vocabulary


Que la première invention de la parole ne vient
pas des besoins, mais des passions.


Jean-Jacques Rousseau, Essai sur l’origine des langues (1781)

Introduction

Fournir à l’apprenant d’une langue étrangère des moyens linguistiques pour qu’il puisse exprimer ses émotions, c’est l’aider à acquérir toutes les compétences communicatives indispensables à la création et au renforcement de liens sociaux et affectifs. L’intérêt que les scientifiques portent aux concepts émotionnels va bien au-delà de leur utilité dans le processus d’enseignement-apprentissage. L’analyse de l’expression des émotions se fait en linguistique à partir d’études sémantiques, grammaticales ou lexicales (Nowakowska-Kempna, 1995 ; Nowakowska-Kempna et al. (éds), 2000). Celles-ci peuvent être menées dans le cadre de la linguistique cognitive et se fondent sur l’idée « qu’il existe un lien entre les émotions et le corps humain, ce lien se manifestant par différentes réactions physiologiques, comportementales et expressives, communes à toute l’espèce humaine » (Kwapisz-Osadnik, 2013 : 151). Ce n’est qu’en 2010 que la didactique des langues a pris comme objet de recherche les émotions et leur expression, grâce aux approches humanistes-affectives (Piccardo, 2013). Les applications de la linguistique cognitive à l’enseignement-apprentissage du FLE ne sont pas très répandues en Pologne, c’est pourquoi il est crucial d’attirer l’attention des didacticiens et des linguistes sur les travaux anglophones d’une importance considérable dans ce domaine.

Nous proposons donc dans cette étude d’appréhender la problématique de l’apprentissage du lexique des émotions par le prisme de la théorie de la métaphore conceptuelle (Lakoff et Johnson, 1980). Nous tenons à souligner que la complexité des concepts émotionnels, maîtrisés par les locuteurs natifs d’une langue, impose aux allophones un apprentissage ciblé, leur permettant de s’exprimer de manière spontanée et authentique. Dans un premier temps, nous allons rappeler le cadre théorique dans lequel se situe notre étude, pour proposer ensuite un parcours didactique autour du lexique des émotions dans le contexte d’un atelier d’écriture créative. Cette analyse nous permettra de questionner l’efficacité d’une approche cognitive au sein d’une classe de langue en prenant en considération les aspects linguistique, social et affectif d’une telle approche. En ce qui concerne les corpus, le premier se compose d’expressions métaphoriques provenant de dictionnaires de la langue française (TLFi, Le Petit Robert, Le Robert Dico en ligne), le second est constitué de rédactions d’étudiants polonais en philologie romane.

1. Quelques considérations préliminaires

En s’inscrivant dans une perspective cognitive, cet article a pour but de lancer une étude des métaphores émotionnelles et de leurs fonctions (Lakoff et Johnson, 1980 ; Kövecses, 2000) afin de relever les relations qui s’établissent entre la langue métaphorique et les émotions. L’analyse basée sur un corpus de collocations métaphoriques a été conduite avec l’idée de s’en servir dans notre pratique de l’enseignement-apprentissage de l’écrit au niveau avancé (B2 selon le CECRL[1]). Dans l’intention de stimuler l’esprit de créativité de nos étudiants quant à l’appropriation du langage figuré, nous avons entrepris une expérimentation didactique auprès d’un groupe de 30 étudiants de 3e année de licence. Elle s’est déroulée pendant 4 semaines et s’est terminée par une série d’entretiens semi-directifs à « la sortie » de l’atelier. Il convient d’ajouter que les cours ont eu lieu pendant le confinement, dans les conditions exceptionnelles de l’enseignement en ligne. Les objectifs généraux peuvent se résumer ainsi : proposer un atelier d’écriture créative pour développer les compétences lexicales, rédactionnelles, créatives et, en même temps, tisser les liens socio – affectifs et socio – cognitifs au sein du groupe. Nous sommes partis du principe qu’à partir d’une entrée lexicale appartenant au monde des émotions, il devient possible d’encourager les étudiants à produire des textes dans lesquels ils pourraient exprimer leurs sentiments[2] à travers les paroles d’autrui.

Comme point de départ pour le travail lexicologique, nous avons choisi deux notions : le silence et la solitude, avec pour objectif de s’interroger sur la conceptualisation des émotions en lien avec ces deux notions. Dans le cas présent, nous nous sommes focalisées sur le lexique du français. Notre choix s’explique par le contexte numérique dans lequel « le silence » peut être de façon classique un signe de difficultés générant de « la solitude à distance » (Dussarps et Paquelin, 2014). Nous avons également été guidées par la conviction qu’il serait avantageux de faciliter à nos étudiants une prise de conscience des émotions par lesquelles ils passent pour les aider à appréhender avec plus de confiance les défis de l’apprentissage (Berdal-Masuy, 2020). Cette expérience a été pratiquée avec l’intention de trouver les réponses aux questions suivantes :

2. Cadre théorique

Cette section sera consacrée aux principes théoriques sur lesquels s’appuie notre étude. Bien que la notion d’émotion soit difficile à définir, son caractère interdisciplinaire nous permet de la considérer d’une manière consensuelle. Ce qui nous paraît également important, c’est de discuter de la place des émotions dans l’enseignement-apprentissage des langues étrangères. Finalement, il nous semble indispensable d’ancrer la section dans la linguistique et de faire avancer la réflexion autour des concepts de métaphore et d’émotion.

2.1. Définir l’émotion

L’étude de l’émotion appartient à plusieurs domaines scientifiques : philosophique, psychologique, neurobiologique ou linguistique (Arregui, 1991 ; Russell, 1992 ; Kövecses, 2000 ; Palmero, 2003, entre autres). Celle-ci démontre qu’une émotion est complexe : en plus d’un état émotionnel particulier (p. ex. la sensation de colère), elle se caractérise par une série de phénomènes qui y sont liés (stimulus, réponses corporelles comme pâlir ou rougir, comportements comme crier ou perdre son calme). Au sens large, l’émotion équivaut à l’affectivité, au sens restreint, « le terme émotion est réservé uniquement pour désigner les émotions dites « basales » ou « primaires » ou « modales », comme la peur, la surprise, la colère, la joie, la tristesse, le dégoût et quelques autres » (Cosnier, 1995 : 150). Dans le cadre de la linguistique cognitive, nous retrouvons de nombreuses études qui ont analysé différents aspects liés à l’expression et à la conceptualisation de l’émotion. Beaucoup d’entre elles ont démontré les ressemblances et les différences entre les langues dans la façon d’exprimer l’émotion par le biais d’une métaphore (Kövecses, 2000 ; Peña Cervel, 2004 ; Soriano, 2016, entre autres). Les études de Wierzbicka (1999) montrent que la sélection linguistique (certaines catégories pour exprimer l’émotion) ne serait pas accidentelle mais reflète des traits culturels. Dans ce travail, c’est l’approche des émotions de Kövecses (2000) qui va nous servir de méthodologie pour une analyse de l’expression des émotions en français. Ladite approche considère les émotions comme des entités ou substances, des personnes ou des forces, et analyse les relations entre la physiologie et les émotions.

2.2. Intégrer l’enseignement du langage des émotions dans une classe de langue étrangère

L’expression de l’émotion n’a pas été traitée dans l’enseignement-apprentissage des langues étrangères avec l’attention qu’elle mérite (Dziwirek et Lewandowska-Tomaszczyk, 2010). Il en va de même pour la dimension métaphorique de celle-ci : elle est généralement absente dans les matériaux didactiques et les manuels. Il convient pourtant de rappeler que tout apprenant d’une langue étrangère doit être capable de communiquer ses émotions de façon efficace et adéquate. La didactique des langues, en s’appuyant sur les recherches en psycholinguistique et les sciences de l’éducation, nous offre un cadre méthodologique qui « suit une progression du connu vers l’inconnu : commencer par les connaissances antérieures pour aller vers des éléments pas forcément inconnus sur le plan formel (les apprenants connaissent l’adjectif rouge), mais souvent inconnus sur le plan sémantique et combinatoire : l’expression être rouge de colère n’est pas forcément connue des apprenants de niveau B1 » (Cavalla, 2015). Apprendre une nouvelle langue signifie comprendre le poids émotionnel de cette expérience. De nouveaux liens affectifs et cognitifs doivent se mettre en place (Kramsch, 2009). L’apprenant d’une langue étrangère, indépendamment de son âge, se trouve en position de vulnérabilité psychologique, car on lui demande de s’exprimer dans une langue qu’il connaît à peine (Horwitz, 1999 : 12). Les approches humanistes des années 1970, en particulier la suggestopédie, et les recherches sur le filtre affectif (Krashen, 1981) prouvaient l’intérêt, à ce moment-là encore très limité, pour des affects[3] (Arnold, 2000). Malgré le rôle périphérique de ces approches dans l’évolution de la réflexion sur la didactique des langues étrangères, il faudrait souligner leur impact sur la sensibilisation à l’importance de la dimension émotionnelle. Grâce aux découvertes en neurosciences des années 1990 (Damassio, 1999), qui ont permis au chercheur-didacticien d’aborder le rapport entre cognition et émotion dans l’apprentissage d’une langue étrangère, le débat a pu être relancé. De nos jours, les approches communicative et actionnelle préconisent la centration sur l’apprenant et sur ses besoins. Tout en reconnaissant leur efficacité sur les plans communicatif, culturel et social, il faut noter cependant, qu’elles n’attachent pas d’importance particulière aux émotions et à leur expression. Considérons à présent le cas du Cadre européen commun de référence pour les langues et de la place que ce document accorde aux sentiments. Dans le volume complémentaire de 2018, les mots sentiment et émotion apparaissent ponctuellement. Ils figurent dans l’activité de la production orale au niveau B1 : « Peut exprimer clairement ses sentiments par rapport à qqch qu’il/elle a vécu et expliquer pourquoi il/elle ressent ces sentiments ». Ensuite, dans la partie Correspondance, au niveau B2, nous pouvons lire : « Peut écrire des lettres exprimant différents degrés d’émotion … », et au niveau C1 : « Peut s’exprimer avec clarté et précision dans sa correspondance personnelle, en utilisant une langue souple et efficace, y compris dans un registre affectif, allusif ou humoristique ». Finalement, l’occurrence du terme émotion se trouve dans la description de la tâche de réaction personnelle à l’égard des textes créatifs, au niveau B2 : « Peut décrire l’émotion suscitée par une œuvre et expliquer pourquoi elle a déclenché cette réaction ». Dans ce cas, il reste à savoir dans quelle mesure la dimension émotionnelle devrait être prise en considération par l’enseignant d’une langue étrangère. Par quels moyens atteindre les buts présentés par les descripteurs du CECRL ? La tâche semble être compliquée, il sera donc important de nous rappeler ce fait au moment d’effectuer notre choix en ce qui concerne les contenus des apprentissages et les méthodes de travail.

Revenons-en à présent à la question de l’enseignement du lexique des émotions en classe de langue. Même si la linguistique cognitive n’a pas encore été vraiment reconnue dans l’enseignement-apprentissage du FLE, et qu’il existe très peu de recherches dans le monde francophone qui ont pu nous servir d’exemple et constituer le point de départ de notre étude, nous sommes toutefois persuadées que ce courant linguistique propose des outils d’analyse pour la description de la langue qu’un/e chercheur/chercheuse-didacticien/didacticienne ne peut pas négliger. Ce sont, entre entres, la métaphore et la métonymie conceptuelle (Lakoff et Johnson, 1980) qui pourraient être exploitées, par exemple, dans l’enseignement-apprentissage des expressions idiomatiques (Boers, 2000) ou des verbes polysémiques, comme cela a été le cas dans des classes d’anglais langue étrangère. Les raisons que nous venons d’exposer, ainsi que l’importance du langage métaphorique dans le discours émotionnel (Kövecses, 2000), nous ont poussés à concevoir des séquences didactiques pour l’enseignement-apprentissage du lexique des émotions inspirées de la théorie de la métaphore conceptuelle. Nous avons également renforcé notre conviction qu’il ne faut pas dissocier l’enseignement de la grammaire de l’enseignement du lexique (Langacker, 1987) d’où l’idée de proposer aux étudiants une approche visant le développement de la compétence collocationnelle.

2.3. La métaphore conceptuelle

La métaphore occupe la place centrale des recherches en linguistique cognitive. Elle n’est plus une figure de style, elle est devenue une ressource remplissant des fonctions cognitives principales : générer de nouvelles connexions entre les idées et conceptualiser des champs linguistiques abstraits. Elle sert à comprendre et à expliquer les phénomènes abstraits à travers des expériences directes (concrètes). La plus grande partie des métaphores utilisées pour exprimer un événement émotionnel sont communes à une multitude de langues, ce qui peut s’expliquer, dans une large mesure, grâce à la notion de cognition incarnée[4] (Johnson, 1987), selon laquelle les bases de la conceptualisation des émotions reposent sur les aspects physiologiques, culturels et sociaux de l’être humain. Par exemple, les domaines conceptuels de la chaleur et de la froideur servent à structurer le champ de l’émotion dans plusieurs langues : l’Émotion, c’est de la chaleur – pour parler des émotions positives et, dans le cas des sentiments négatifs l’Émotion, c’est de la froideur. C’est pourquoi nous disons qu’une personne « chaude » est une personne chaleureuse. D’autres expressions (en français et dans beaucoup de langues) exploitent la même association : accueil chaleureux, paroles chaleureuses, rester froid, etc. L’association est due probablement à la corrélation entre l’émotion et la chaleur de nos expériences vécues dès la plus petite enfance quand la sensation de la chaleur provenait du corps de la mère ou du père qui embrassaient leur bébé. Il est important d’ajouter aussi que pour pouvoir analyser la métaphore d’un point de vue linguistique, il est nécessaire de parler de deux niveaux : conceptuel et linguistique, où se situent, respectivement, les métaphores conceptuelles et les expressions métaphoriques linguistiques.

2.3.1. Les métaphores ontologiques

La grande variété des métaphores ontologiques, c’est-à-dire « des manières de percevoir des événements, des émotions, des idées, etc., comme des entités et des substances » (Lakoff et Johnson, 1985 : 36), tire son origine de notre expérience des objets physiques. L’avantage de conceptualiser les émotions comme des substances est telle que nous pouvons penser aux émotions en appliquant nos vastes connaissances des entités physiques. L’un des exemples les plus évidents de ce type de métaphore est la personnification : l’objet est précisé avec des termes d’ordinaire attribués à une personne, considérant humain ce qui ne l’est pas, par exemple : La vie m’a trompé. La maladie l’a frappé. Nous tenons à rappeler que notre analyse des métaphores ontologiques s’appuie sur celle proposée par Kövecses (2000) : les émotions sont des entités, des substances ou des personnes : a) l’émotion est un événement ; b) l’émotion est une personne ; c) l’émotion est un objet ; d) l’émotion est une force antagoniste.

2.3.2. Présentation et analyse du corpus d’expressions métaphoriques

Notre corpus d’expressions métaphoriques a été conçu dans le but d’attirer l’attention des apprenants sur l’emploi omniprésent des métaphores. Le choix des notions de « silence » et de « solitude » n’a pas été fortuit. Durant le confinement, nous avons été confrontées à une expérience inédite : l’enseignement en ligne avec tous ses avantages et inconvénients. La plupart du temps, les questions que nous posions aux étudiants demeuraient sans réponse, il était difficile d’entamer une discussion, de nouer des contacts personnels. Nous nous rendions compte du fait que le silence était dû aux émotions éprouvées : manque de confiance, fatigue, manque de motivation, troubles spécifiques de l’apprentissage, etc. Pour essayer de remédier à cette faille et pour ne pas nous sentir impuissantes, nous avons eu l’idée de travailler sur le lexique des émotions, l’aspect que nous considérons comme crucial dans l’enseignement-apprentissage des langues étrangères. Dans cette section nous présentons une analyse linguistique du corpus de constructions verbo-nominales (collocations) qui a constitué le fondement de l’élaboration du parcours didactique.

Figure 1. Carte mentale présentant le corpus d’expressions semi-figées[5] (collocations) et figées liées au terme « silence »
Source : élaboration propre

Le tableau ci-dessous illustre les liens entre les expressions métaphoriques linguistiques provenant du corpus « silence » et les métaphores conceptuelles s’y référant.


Tableau 1. La notion de silence et les métaphores conceptuelles correspondantes
Expressions métaphoriques Métaphores conceptuelles correspondantes
silence de mort LE SILENCE C’EST LA MORT
rompre le silence LE SILENCE EST UNE ENTITÉ CASSABLE
passer qqch sous silence LE SILENCE EST UNE COUVERTURE
se réfugier dans le silence LE SILENCE EST UN ABRI (UN CONTENEUR)
attaquer par le silence LE SILENCE EST UN ENNEMI
s’astreindre au silence LE SILENCE EST UNE ENTITÉ NON-VOULUE
le silence irrite, agace, dérange LE SILENCE EST UNE FORCE CAUSATIVE
garder le silence LE SILENCE EST UN OBJET PRÉCIEUX
imposer le silence LE SILENCE EST UNE ENTITÉ NON-VOULUE
briser un mur de silence LE SILENCE EST UN MUR

Le silence, notion concrète métaphorisée, constitue un point de départ pour la conceptualisation des émotions qui sont composées de substances enfermées dans un conteneur ou sont comparées à celui-ci.

Figure 2. Carte mentale présentant le corpus d’expressions semi-figées (collocations) liées au terme « solitude »
Source : élaboration propre

Le tableau ci-dessous représente des constructions verbo-nominales du corpus « solitude » avec les métaphores qui leur correspondent.


Tableau 2. La notion de « solitude » et les métaphores conceptuelles respectives
Expressions métaphoriques Métaphores conceptuelles correspondantes
gérer la solitude LA SOLITUDE EST UNE ENTITÉ CONTRÔLABLE
vaincre la solitude LA SOLITUDE EST UN ENNEMI
vivre dans la solitude LA SOLITUDE EST UN LIEU (UN CONTENANT)
fuir la solitude LA SOLITUDE EST UNE ENTITÉ NON-VOULUE
affronter la solitude LA SOLITUDE EST UN ENNEMI
lutter contre la solitude LA SOLITUDE EST UN ENNEMI
souffrir de solitude LA SOLITUDE EST UNE MALADIE
rompre la solitude LA SOLITUDE EST UNE ENTITÉ CASSABLE
dépasser la solitude LA SOLITUDE EST UN OBSTACLE

Comme nous avons pu le voir plus haut, les deux notions soumises à notre analyse, perçues comme des entités, sont à l’origine d’une grande variété de métaphores ontologiques. Dans la plupart des cas, nous avons affaire à des constructions verbo-nominales dont les verbes, porteurs du sens métaphorique, précisent le statut ontologique des notions de silence et de solitude. Il faudrait souligner également que celles-ci sont utilisées de manière métonymique[6], c’est-à-dire en donnant un accès cognitif à un grand nombre d’émotions. D’après les linguistes cognitivistes, la métonymie, de la même manière que la métaphore, « fait partie intégrante des systèmes conceptuels qui sous-tendent notre façon de penser et d’agir » (Rydning, 2003 : 72).

3. Comment enseigner le lexique des émotions ?

L’étude expérimentale que nous avons menée visait à déterminer dans quelle mesure l’enseignement-apprentissage des expressions semi-figées, via des activités intégrées pédagogiquement dans les cours, permet aux apprenants de français langue étrangère de s’approprier celles-ci et d’activer le lexique émotionnel dans le cadre de la pratique de l’écriture créative. Nos propositions pour l’enseignement des collocations ne constituent pas de simples activités de préparation lexicale à l’écriture.

Figure 3. Fragment du mur virtuel (PADLET) créé avec les textes des participants à l’atelier

Partant du principe que le travail sur les collocations, qui sont liées au fonctionnement « ordinaire » de la langue, présente un intérêt didactique supérieur (Grossman, 2008), nous avons décidé de porter une attention particulière sur cet élément de la langue, et ce d’autant plus que le lexique des émotions, abstrait et difficile en raison de sa richesse conceptuelle, est, en général, difficilement assimilé par les apprenants du FLE. La sensibilisation à ce type de lexique a permis aux étudiants de comprendre que « le sens des mots ne se laisse pas toujours appréhender clairement à travers le dictionnaire » (Grossman, 2008 : 6). La tâche finale proposée, écrire un texte créatif en y insérant un nombre indéfini de constructions verbo-nominales provenant des corpus mentionnés au préalable, nous a permis d’élaborer un deuxième corpus, cette fois à partir des productions écrites de nos étudiants. À notre avis, cette activité d’écriture créative avec contrainte incite les apprenants à employer le vocabulaire visé, ce qui facilite sa mémorisation, et les motive à produire des textes plus authentiques. Nous avons également proposé aux étudiants de créer un mur virtuel (PADLET) pour les inciter à partager les textes avec leurs camarades et mettre l’accent sur le tissage des liens affectifs dans le cadre de l’enseignement à distance.

3.1. Participants et activités réflexives

Le public était composé d’étudiants de la Licence en philologie romane qui avaient entre 20-25 ans et qui, pour la plupart, ont suivi des cours de français depuis 3 ans. La participation aux activités d’écriture créative a fait l’objet d’une évaluation positive non seulement de notre part mais aussi de la part des étudiants. Nous avons commencé notre expérience par un parcours consacré aux réflexions portant sur les émotions. L’activité qui a été proposée en premier lieu avait pour but de repérer les concepts liés aux sentiments de « solitude » et de « silence » et de favoriser leur compréhension. Pour ce faire, nous avons posé aux étudiants les questions suivantes : Qu’est-ce que vous ressentez quand il y a un « silence profond » autour de vous ? ; Quels sont les termes, les notions qui vous viennent à l’esprit quand vous entendez le mot « solitude » ? Afin de réduire le stress, nous avons proposé un travail collaboratif en petits groupes (nous avons « créé » des salles de travail sur Teams). Les étudiants ont ensuite noté toutes leurs idées sur tableau blanc et ont élaboré ainsi un support visuel dont ils pouvaient se servir à chaque étape du parcours didactique. Ce travail de sensibilisation au lexique des émotions nous a permis de constater que nos étudiants n’utilisaient pas de termes figés pour décrire leurs sentiments (les résultats ont confirmé une fois de plus nos observations antérieures concernant les compétences lexicales de ce groupe d’étudiants). La partie réflexive de notre parcours s’est terminée par une activité consacrée à la métaphore dans l’expression des émotions et dans le langage quotidien. C’est à ce moment-là que nous avons enchaîné avec une brève présentation de la notion clé de notre expérimentation : la métaphore conceptuelle. Comme document déclencheur, nous avons proposé le visionnage d’un extrait du cours magistral donné par George Lakoff dans lequel il fait connaître, d’une manière claire et concise, les principes de la théorie de la métaphore conceptuelle. La séquence didactique suivante a permis d’appliquer ladite théorie en présentant une série de métaphores conceptuelles afin d’activer le vocabulaire associé à la thématique des émotions sous-jacentes.

Activité 1 :
Notez tous les verbes, les noms ou expressions qui, à votre avis, décrivent les émotions véhiculées par les métaphores conceptuelles suivantes :
1. LE SILENCE EST UN ENNEMI
2. LA SOLITUDE EST UN LIEU (UN CONTENANT)
3. LE SILENCE EST UN OBJET PRÉCIEUX
4. LA SOLITUDE EST UN OBSTACLE
5. LE SILENCE EST UN MUR
6. LA SOLITUDE EST UNE MALADIE
La séquence a été divisée en 2 étapes : tout d’abord le travail sans dictionnaires, ensuite les étudiants ont pu se servir du dictionnaire Trésor de la langue française informatisé. Les apprenants ont éprouvé des difficultés importantes à trouver des constructions correctes et la deuxième étape a révélé la méconnaissance des collocations de base. L’activité suivante a été conçue sur la base d’un corpus de phrases sélectionnées[7] par rapport aux constructions verbo-nominales dont l’acquisition était visée dans notre expérimentation.
Activité 2 :
Lisez attentivement les phrases ci-dessous et repérez les verbes métaphorisés qui se combinent avec les mots « solitude » et « silence » (parfois il est question d’autres constructions).
1. Le moment d’après aussi, le silence de mort rapporté par les témoignages, la sidération, qui ont précédé les premiers secours, l’aide apportée par des professionnels mais aussi des non-professionnels, et les gestes héroïques qu’il y eut aussi ce soir-là.
2. Je suis heureux que vous rompiez enfin ce silence qui s’était installé entre nous.
3. Impossible, pourtant, de passer sous silence le débat que soulevait cette affaire.
4. Crimes haineux : prendre la parole ou se réfugier dans le silence ?
5. Ce père, ce mari, cette mère … ces gens qui, quand les autres « n’obéissent » pas, attaquent avec le silence.
6. S’astreindre au silentium est une condition de la réflexion mais aussi la manifestation d’un contrôle des passions (Sénèque).
7. Nous devrions garder le silence sur ceux qui sont au pouvoir ; en dire du bien implique presque de la flatterie ; dire du mal d’eux de leur vivant est dangereux, et quand ils sont morts, c’est lâche (La Bruyère 1645-1696).
8. Avant de quitter la salle, les professeurs imposent le silence.
9. Ce coup de fil du Président américain a permis de briser un mur de silence.
10. […] décompresser, comment me concentrer, comment garder les pieds sur terre, comment gérer l’ennui, comment gérer la solitude.
11. À qui s’adressent toutes ces initiatives qui tournent autour de « vaincre la solitude des personnes âgées » ?
12. Il rentre à 19 ans dans un monastère de vie contemplative ayant choisi de vivre la solitude à plein, à fond.
13. La plus constante de nos occupations ne serait pas de fuir la solitude si la solitude n’était notre plus originaire et plus constante expérience.
14. Partageons des lecteurs qui nous aident à affronter notre solitude et nous permettent d’interroger nos liens à l’autre.
15. Lutter contre la solitude est un besoin urgent de santé publique.
16. D’allure très jeune, originale, sympathique, elle souffre de solitude dans sa vie de jeune maman, maintenant très orientée vers son bébé.
17. Les espaces de coworking sont un bon moyen de rompre la solitude.
Activité 3 :
Associez les constructions verbo-nominales ou expressions figées suivantes aux métaphores conceptuelles correspondantes :
a) rompre le silence 1. LE SILENCE EST UNE COUVERTURE
b) briser un mur de silence 2. LE SILENCE EST UNE ENTITÉ NON-VOULUE
c) passer qqch sous silence 3. LE SILENCE EST UNE ENTITÉ CASSABLE
d) s’astreindre au silence 4. LA SOLITUDE EST UN ENNEMI
e) vivre dans la solitude 5. LE SILENCE EST UN MUR
f) lutter contre la solitude 6. LA SOLITUDE EST UN LIEU (UN CONTENANT)
g) gérer la solitude 7. LA SOLITUDE EST UNE ENTITÉ CONTRÔLABLE

Les activités proposées ont permis aux étudiants de se familiariser avec la notion de métaphore conceptuelle, de prendre conscience de l’importance des constructions verbo-nominales dans le discours et de leur présence dans le langage quotidien. Ce qui a été révélateur, c’était le travail de recherche effectué à l’aide du dictionnaire TLFi ainsi que du Dictionnaire des cooccurrences Termium Plus.

3.2. Activités d’écriture créative

Dans cette séquence nous avons invité les étudiants à écrire une histoire autour des émotions accompagnant les moments de silence ou de solitude (au choix). Nous leur avons demandé d’employer le nombre le plus élevé possible d’expressions récemment apprises et de laisser libre cours à leur créativité. L’extrait d’un texte d’une étudiante témoigne de cette créativité éveillée afin de susciter des émotions.

14 janvier, 2021
Je ne peux pas vivre en silence. Le silence me fait peur, me rend seul, me prive de mon armure, me révèle et m’expose. Je vis dans la précipitation, dans le bruit et le chaos, entouré d’étrangers - le tout pour ne pas heurter le silence angoissant. Avec un cœur tremblant, je retourne à mon appartement, ce qui devrait m’entourer d’un sentiment de sécurité et de paix. Alors pourquoi est-ce complètement différent ?
22 mars, 2021
Je brise obstinément le silence. Je ne le laisse pas gagner. Mais à quel point puis-je me battre contre un adversaire aussi impitoyable, invisible et insaisissable ? Le silence signifie la solitude pour moi, je ne peux pas en profiter. Je ne sais pas qui je suis, quand je suis seul, quand les gens ne sont pas là. Je suis devenu accro à la surabondance de stimuli parce que j’ai peur de faire face à la prise de conscience que lorsque les autres ne peuvent pas me voir, je ne suis qu’une épave ou une coquille. Il y a un silence sépulcral en moi.
30 mai, 2021
Je commence à me demander si le silence est le problème. Peut-être, il est quelque part plus profond, hors de ma portée.
3 juin, 2021
Je me sens réduite au silence par le monde entier[8].

Nous avons également proposé aux apprenants une activité de lecture d’histoires devant le groupe et de placer leurs textes sur le PADLET. Dans le cadre de ce parcours didactique consacré aux émotions et à leur expression au niveau linguistique, il nous a paru utile de présenter aux étudiants un fragment du roman de Jean-Jacques Rousseau « Rêveries du promeneur solitaire » et de leur demander ensuite d’écrire la suite du texte « à la manière de ». Nous considérons que l’exploitation d’un texte littéraire est une opportunité précieuse de susciter des émotions grâce à un « cadre émotionnel » qui est défini ainsi : « Nous utilisons le terme de cadre émotionnel pour rappeler le fait que, dans le récit fictionnel, les lieux décrit sont fréquemment investis, psychologisés et jouent d’une certaine manière le rôle actant, au sens de la sémiotique narrative » (Grossman et al., 2008 : 199, cité par Cavalla, 2015 : 123). Dans cette section, nous n’avons présenté que quelques-unes des activités réalisées dans le cadre de l’atelier d’écriture créative. Décrire leur éventail plus large dépasserait largement les limites de cet article.

3.3. Résultats

Après avoir étudié les productions de nos étudiants, nous avons constaté qu’elles indiquaient des acquis lexicaux non négligeables, ce qui prouve, d’une certaine manière, que notre expérimentation n’a pas échoué. Comme nous l’avons signalé plus haut, nous avons effectué des entretiens avec chacun des participants à l’atelier, dans le cadre de séances du tutorat, pendant lesquelles nous avons posé aux participants des questions sur leur vécu sur le plan émotionnel : comment avez-vous vécu votre participation à l’atelier ? et sur le plan cognitif : qu’est-ce que vous avez appris ? Il semblerait que nous pourrions avancer grâce à cette expérience que les activités d’écriture créative aident à regagner de l’auto-estime (les étudiants ont fini par croire en leur performances scripturales) et à les faire s’exprimer à propos de sujets difficiles durant le confinement. Les lectures des productions écrites, effectuées pendant les cours, ont permis aux étudiants de mieux se connaître et de devenir plus sûrs d’eux-mêmes. En revanche, nous ne pouvons pas affirmer dans l’immédiat que notre conception de l’approche cognitive, appuyée sur la théorie de la métaphore conceptuelle, permet aux apprenants avancés du FLE d’acquérir le lexique des émotions à long terme. Faute de temps, nous n’avons pas eu la possibilité de réaliser un post-test qui pourrait confirmer une telle hypothèse. Par ailleurs, notre proposition de partager les textes sur PADLET n’a pas vraiment attiré les étudiants. Il faudrait mentionner que seul un tiers du groupe a accepté de prendre part à cette expérience. Par conséquent, il se pose la question de savoir comment éveiller un esprit collaboratif au sein des groupes des apprenants des langues étrangères à l’université.

Conclusions et perspectives

L’étude que nous venons de présenter constitue l’une des prémisses d’une thèse de doctorat qui portera sur les applications possibles de la linguistique cognitive dans l’enseignement-apprentissage du lexique et de l’écrit au niveau universitaire. Nous souhaiterions pouvoir continuer à mener nos recherches expérimentales qui, nous l’espérons, confirmeront nos hypothèses portant sur l’efficacité de l’application de la linguistique cognitive dans l’enseignement-apprentissage du FLE au niveau avancé (B2). Notre courte expérimentation qui avait pour but de renforcer la motivation des étudiants à apprendre à écrire en français et de les persuader que l’écriture peut constituer une source de motivation, s’est avérée très fructueuse du point de vue affectif et cognitif. Nous avons réussi à renforcer les interactions avec nos étudiants en créant un climat propice à l’apprentissage. Les apprenants ont pu développer leurs performances lexicales ainsi que les connaissances théoriques en linguistique cognitive.

Pour conclure, reprenons les interrogations posées au départ :

Les commentaires recueillis auprès des apprenants expriment bien l’utilité considérable de l’étude de la langue figurée. Cette analyse leur a permis d’avancer dans l’acquisition des compétences en français et de s’exprimer d’une manière plus recherchée et surtout plus authentique. L’apprentissage conscient donne accès au sens d’une manière non seulement plus exigeante du point de vue cognitif mais aussi plus complète, ce qui influe sur l’évolution des émotions ressenties par les étudiants. Notre expérimentation ne nous a malheureusement pas permis de répondre à la dernière question posée plus haut et cela pour deux raisons : il faudrait prévoir un travail avec un groupe contrôle pour que les résultats soient plus fiables et il serait important également d’effectuer des tests répartis sur plusieurs mois pour pouvoir s’assurer de la mémorisation du lexique à long terme.

L’émotion est la clé de voûte de tout apprentissage, il est donc essentiel que l’apprenant s’approprie le sentiment linguistique qu’acquiert un locuteur natif pendant les premières années d’apprentissage de sa langue maternelle (Martinot, 2014).



*Joanna Kopeć est chercheuse-didacticienne au Département de la linguistique appliquée et de la didactique des langues romanes au sein de l’Institut d’Études Romanes de l’Université de Łódź. Ses recherches portent sur la didactique de l’écrit du FLE au niveau avancé (B2), la didactique du lexique et les applications de la linguistique cognitive dans l’enseignement-apprentissage du FLE. Sa dernière publication : « Applicabilité du modèle cognitif des images schématiques dans l’enseignement-apprentissage de l’écrit au niveau universitaire », e-Scripta Romanica, 9, p. 28-40. joanna.kopec@uni.lodz.pl


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Notes de bas de page

  1. Cadre européen commun de référence pour les langues.
  2. Nous utilisons ici le mot sentiment comme le terme regroupant les sentiments et les émotions. Dans « L’erreur de Descartes », A. Damassio sépare émotions et sentiments. Ainsi les émotions sont « des phénomènes physiques en réaction à des situations ; elles précèdent et déclenchent des sentiments. Ce sont des phénomènes interdépendants qui peuvent se regrouper sous le terme d’affects (émotions, sentiments, humeurs, préférences, capacités) ».
  3. Flaux et Van de Velde (2000) regroupent sous le terme de « noms d’affects » les noms de sentiment ainsi que les noms d’émotion.
  4. angl. embodiment.
  5. Les unités polylexicales caractérisées par une cooccurrence privilégiée de mots dans un texte/discours et dont le sens peut être « deviné » en réception, ce qui veut dire qu’un locuteur non natif peut difficilement produire les lexèmes adéquats sans en avoir mémorisé la forme (Bertocchini, Constanzo, 2017 : 174).
  6. Conceptual metonymy is a cognitive process in which one conceptual entity, the vehicle, provides mental access to another conceptual entity, the target, within the same conceptual domain, or ICM. In metonymy, both the vehicle entity and the target entity are elements of one and the same conceptual domain (Kövecses, 2010 : 323).
  7. Le corpus de phrases a été rassemblé et actualisé systématiquement dans les années 2020-2022 (presse en ligne : Charlie Hebdo.fr ; Le Monde ; LeDevoir ; Philosophie Magazine ; Cairn.info ; lefigaro.fr ; les dictionnaires mis en ligne : Le Robert Dico en ligne ; linguee.com ; quelques citations de personnages célèbres)
  8. Texte écrit par l’étudiante dans la première version du texte. Il illustre la présence des expressions d’émotions étudiées.

COPE

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Received: 29.08.2022. Accepted: 11.10.2022.